Cet extrait nous propose avant tout une déclaration d'amour que l'on peut qualifier de réciproque. Cette déclaration apparaît très clairement chez Célimène puisqu'elle est explicite ; en effet, à une question d'Alceste elle répond : "vous êtes aimé" (vers 503). Et elle n'hésite pas à redire son amour avec l'expression "ayant pris soin de vous dire (mon amour)" (v506) (...)
[...] Rien ne semble donc faire obstacle au bonheur de Célimène et d'Alceste qui s'aiment. Pourtant il faut bien constater que pour nos deux amoureux tout ne va pas pour le mieux. Et il est assez aisé de démontrer que, malgré leur amour, nos deux héros s'opposent, ce qui est a priori assez surprenant dans une scène d'amour. On remarque, en effet, que les répliques s'enchaînent autour de liens logiques d'opposition avec "mais" (v495), "certes" (v509), employés par Célimène et "mais" (v501, 507), (v504), employés par Alceste. Curieuse façon de parler d'amour ! [...]
[...] Parallèlement, Alceste va aussi remettre en cause son amour pour Célimène: en effet il affirme "fai(re) tout (s)on possible/A rompre de ce coeur l'attachement terrible." (v517-518): déjà il qualifie son amour comme quelque chose de "terrible", de monstrueux et d'autre part il explique faire des efforts pour ne plus être amoureux de Célimène ! Enfin, quand Célimène conclut l'extrait en qualifiant l'amour d'Alceste pour elle d'"amour ( . ) grondeur" (v528), on peut considérer que cet oxymore a pour effet d'ôter à cet amour toutes ses caractéristiques pour le dénaturer et n'en faire plus qu'un affrontement. Difficile donc de parler encore d'amour entre Célimène et Alceste. [...]
[...] De même, "la méthode en est toute nouvelle" (v525) repose sur un trait d'humour, Célimène relevant une nouvelle fois ironiquement que la technique d'Alceste pour la séduire et qui consiste à passer son temps à critiquer est bien étrange. Si Célimène s'amuse de la petite querelle amoureuse qui l'oppose ici à Alceste, si elle se moque de sa jalousie maladie, c'est peut-être toutefois pour mieux masquer l'inquiétude qui la gagne: en effet, ce qui n'était qu'une dispute sans réelle gravité entre amoureux, n'est-il pas en train de devenir une véritable scène d'affrontement dans laquelle tout amour a disparu ? [...]
[...] Sa comédie Le Misanthrope, écrite en alexandrins à rimes plates, met en scène Alceste qui présente, pour un misanthrope, l'originalité d'être amoureux de Célimène, une jeune coquette mondaine. Dans la scène 1 de l'acte II, Alceste s'est rendu chez Célimène et ils ont une franche discussion concernant l'avenir de leur couple. S'il s'agit d'une plaisante et ambiguë scène d'amour entre les deux personnages, on verra néanmoins que tout bascule vers une véritable et grave scène d'affrontement. Cet extrait nous propose avant tout une déclaration d'amour que l'on peut qualifier de réciproque. [...]
[...] Néanmoins, cette opposition entre Alceste et Célimène correspond à l'une des grandes crises sans véritable importance que rencontre tout couple et la scène repose sur un registre comique. En tout cas c'est ainsi que Célimène analyse son altercation avec Alceste: en expliquant que, concernant ce que dit Alceste, "la fleurette est mignonne" (v509), elle indique que la façon utilisée par Alceste de lui conter "fleurette", pour la séduire est surprenante, amusante, ce qui indique le registre de l'extrait: Célimène s'amuse, rit à entendre les propos un peu délirant de son amant. [...]
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