Rapidement rédigé, le Dom Juan de Molière fut représenté pour la première fois le dimanche 15 février 1665 au Théâtre du Palais Royal, et vivement applaudi.
Cette pièce fait suite à l'interdiction de Tartuffe, du même auteur. Son écriture répond à un besoin urgent de faire vivre sa troupe de théâtre (...)
[...] DOM JUAN - À moins de cela, tu ne l'auras pas. SGANARELLE - Va, Va, jure un peu, là n'y a pas de mal. DOM JUAN - Prends, le voilà prends, te dis-je, mais jure donc. LE PAUVRE - Non, Monsieur j'aime mieux mourir de faim. DOM JUAN - Va, Va, je te le donne pour l'amour de l'humanité. Mais que vois- je là? un homme attaqué par trois autres? La partie est trop inégale, et je ne dois pas souffrir cette lâcheté. [...]
[...] Monsieur, je suis dans la plus grande nécessité du monde. DOM JUAN - Tu te moques: un homme qui prie le Ciel tout le jour ne peut pas manquer d'être bien dans ses affaires. LE PAUVRE - Je vous assure, Monsieur, que le plus souvent je n'ai pas un morceau de pain à me mettre sous les dents. DOM JUAN - Voilà qui est étrange, et tu es bien mal reconnu de tes soins. Ah! ah! je m'en vais te donner un louis d'or tout à l'heure, pourvu que tu veuilles jurer. [...]
[...] Son athéisme est donc à considérer dans la perspective d'une quête de liberté. b. Joueur ou humaniste ? Dom Juan paraît jouer, lorsqu'il tente le pauvre par son louis d'or afin de le détourner de sa foi. Mais il perd à ce petit manège, car l'homme s'y refuse ; Dom Juan finit par lui céder le louis d'or, mais il le fait non pas dans un esprit religieux d'aumône, mais (prétendument du moins) pour l'amour de l'humanité Dom Juan semble alors s'attacher à l'idée de porter secours à un être humain dans le besoin, beaucoup plus qu'à l'obligation religieuse. [...]
[...] prie-le qu'il te donne un habit, sans te mettre en peine des affaires des autres. SGANARELLE - Vous ne connaissez pas Monsieur, bon homme! il ne croit qu'en deux et deux sont quatre et en quatre et quatre sont huit. DOM JUAN - Quelle est ton occupation parmi ces arbres? LE PAUVRE - De prier le Ciel tout le jour pour la prospérité des gens de bien qui me donnent quelque chose. DOM JUAN - Il ne se peut donc pas que tu ne sois bien à ton aise? [...]
[...] Il use alors de plusieurs procédés rhétoriques et logiques : - il ironise sur l'absence de gratitude de Dieu envers le pauvre : Tu te moques: un homme qui prie le Ciel tout le jour ne peut pas manquer d'être bien dans ses affaires - il constate de manière abrupte la situation matérielle de celui-ci - il adopte une position didactique en tentant de lui faire prendre conscience des contradictions de son existence On peut ajouter que Dom Juan semble prendre plaisir à se comporter ainsi ; en témoignent ses rires répétés : Ah ! Ah ! Ah Conclusion Cette scène est restée dans la postérité, malgré la brièveté de la rencontre avec le pauvre. Mais cela n'a pas empêché une très forte réaction des autorités de censure, qui ont réussi à la faire interdire pour un temps. Du point de vue de la construction du personnage, elle est très révélatrice des traits de caractère et de mentalité de Dom Juan. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture