Vaine, longue, insatisfaite, la quête d'Achab n'est autre qu'une quête de l'Absolu.
Achab pense pouvoir prévoir l'instant où il rencontrera la baleine pour la vaincre grâce à ses cartes et de judicieux calculs. Il imagine pouvoir le faire « à des heures prévues », dans des champs « bien connus », en d'autres termes, il espère pouvoir « régler le lieu et l'heure » ; mais c'est sans compter sur la force de l'Absolu, incarnée dans la mer et Moby Dick.
Achab se trouve pour commencer sur la mer, qu'il est impossible de maîtriser ; insatiable, dangereuse et souveraine, il doit s'y remettre totalement, mais, comme le précise le texte, son immensité fait sa complexité (« les plus vastes espaces »).
[...] Ici, son cerveau s'élançait pour une course haletante au point que, las et défaillant, il lui fallait monter sur le pont pour recouvrer des forces. Dieux ! que les transes des tourments peuvent ronger un homme dont la vengeance est insatisfaite ! Il dort les poings serrés ; s'il se réveille, c'est avec ses ongles enfoncés dans ses paumes. (p282-283) Non, dans le sommeil, l'essence même de son âme, délivrée du joug de son esprit, se révoltait et cherchait à s'enfuir de lui comme d'un terrible compagnon (p283) Vaine, longue, insatisfaite, la quête d'Achab n'est autre qu'une quête de l'Absolu. [...]
[...] A travers son enveloppe corporelle, les divinités ne se vengeraient-elles pas face à l'arrogance de sa quête ? (cf. fiche nº5) La vengeance d'Achab est insatisfaite, une idée de vide se retrouve, mais à travers ce vide qui nous tient en haleine tout au long du récit, c'est une présence qui s'exprime. Celle de la baleine, incarnation même de l'Absolu (cf. fiche nº3), cette idée est très importante, car c'est un point clef dans la compréhension du roman, la présence de la baleine vient déborder le récit, puisqu'elle n'est pas décrite. [...]
[...] La référence divine est claire et directe : Dieux ! ; de plus, la forme exclamative indique clairement l'appel qui est formulé, il sonne presque comme une plainte, une manière de supplier les Dieux. D'autant plus que Achab ne traverse pas des tourments, mais se trouve dans les transes des tourments il dépasse ses tourments, ou plutôt ses tourments le dépassent et lui font subir une transe douloureuse. Cette idée de douleur se retrouve également dans les derniers mots du passage, lorsque Achab s'automutile, se punit de son propre chef ! [...]
[...] Moby Dick, Melville, étude d'un extrait : Achab et la quête profonde de l'Absolu Ainsi donc, non seulement Achab pouvait espérer rencontrer sa proie à des heures prévues et dans des champs séparés mais bien connus et aussi, en traversant les plus vastes espaces entre ces pâturages d'eau, il pouvait, par son art, régler le lieu et l'heure de son chemin, de sorte que l'éventualité d'une rencontre était loin d'être impossible. (p280-281) Cela dit, n'est-ce pas une idée folle d'imaginer qu'une baleine rencontrée dans le vaste Océan puisse être identifiée par le chasseur, tout comme le mufti à la barbe blanche dans les rues surpeuplées de Constantinople ? [...]
[...] De nouveau, l'essence même de l'Absolu s'incarne dans la baleine. Pour commencer, on trouve une idée de domination de la baleine sur la réalité et les hommes. Tandis que pour reconnaître un mufti dans les rues de Constantinople il faut être chasseur, la baleine, elle, singulière, unique et puissante, est reconnue de tous ; il nous est même impossible de ne pas la reconnaître, elle s'impose a notre regard et sa force s'exprime sans que nous ne puissions l'ignorer ne pouvaient pas, je l'ai déjà dit, ne pas être reconnus. [...]
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