Géant originaire de l'étoile Sirius, Micromégas accomplit un voyage à travers l'univers en compagnie de son ami dont il a fait connaissance lors de sa première escale sur Saturne (chapitre I). Tous deux arrivent sur la Terre le 5 juillet 1737 (chapitre III) et rencontrent peu après un vaisseau qui transporte les membres d'une expédition scientifique. Malgré la différence de taille, ils parviennent à entrer en contact avec les Terriens. Dans le début de l'excipit, les deux géants ont commencé à interroger les philosophes français naufragés et ont obtenu des réponses unanimes et spontanées, dénonçant la folie des hommes et la violence des guerres : ils sont tous à l'unisson sur les réalités physiques. Mais, lorsque Micromégas leur soumet un problème d'ordre métaphysique, l'harmonie jusque-là affichée laisse place au plus grand des désordres, chacun ayant sa propre théorie.
I- Une satire des théories philosophiques
a- Un dialogue philosophique dirigé par Micromégas
Incontestablement, l'excipit du conte laisse Micromégas dominer le dialogue, au sens propre comme au sens figuré :
- le narrateur insiste sur sa taille extraordinaire : l'animal de huit lieues (ligne 17), un autre sage qu'il tenait sur son pouce (ligne 27) et rappelle sa condition le sage de Sirius (ligne 31).
- il a l'initiative de l'échange, contrairement au Saturnien qui n'intervient jamais : Enfin Micromégas leur dit (ligne 1), reprit le Sirien (ligne 11), Alors M. Micromégas, adressant la parole à un autre sage (ligne 27), Et toi, mon ami, dit-il à un leibnizien qui était là (ligne 31)... À l'instar d'un père, il a un ton protecteur (Et toi, mon ami, ligne 31 ; il leur parla encore avec beaucoup de bonté, lignes 54-55) et tutoie les philosophes (Mais qu'entends-tu par esprit ?, ligne 19 ; Mais sais-tu..., ligne 21 ; me dirais-tu bien..., ligne 24...), qui eux témoignent du respect et le vouvoient (Que me demandez-vous là ?, ligne 19). Aucun, à part le philosophe cartésien, ne prend pas la parole sans y être invité et tous se taisent lorsqu'il met fin à l'entretien. Cette omniprésence est justifiée par ses qualités. Il a beaucoup d'esprit et ses voyages lui ont enseigné la modération et la prudence (...)
[...] Effectivement, il leur donna ce volume avant son départ : on le porta à Paris à l'Académie des sciences ; mais, quand le secrétaire 60 l'eut ouvert, il ne vit rien qu'un livre tout blanc : Ah ! dit-il, je m'en étais bien douté. Péripatéticien : disciple d'Aristote (littéralement, qui se promène). Entéléchie : mot utilisé par Aristote pour désigner une réalité parvenue à son degré de perfection. Louvre : on lit dans l'édition de 1752 : Il cita le passage ; l'édition de Berlin cite le passage entier qui signifie : ce dont l'essence enveloppe l'existence. [...]
[...] Dites- moi ce que c'est que votre âme, et comment vous formez vos idées. Les philosophes parlèrent tous à la fois comme auparavant ; mais ils furent tous de différents avis. Le plus vieux citait Aristote l'autre prononçait le nom de Descartes, celui-ci de Malebranche, cet autre de Leibnitz, cet autre de Locke. Un vieux péripatéticien dit tout haut avec confiance : L'âme est un entéléchie et une raison par quoi elle a la puissance d'être ce qu'elle est. C'est ce que déclare expressément Aristote, page 633 de l'édition du Louvre : Ἐντελεχεῖα ἐστι, etc - Je n'entends pas trop bien le grec, dit le géant. [...]
[...] - il a l'initiative de l'échange, contrairement au Saturnien qui n'intervient jamais : Enfin Micromégas leur dit (ligne reprit le Sirien (ligne Alors M. Micromégas, adressant la parole à un autre sage (ligne Et toi, mon ami, dit-il à un leibnizien qui était là (ligne 31) À l'instar d'un père, il a un ton protecteur (Et toi, mon ami, ligne 31 ; il leur parla encore avec beaucoup de bonté, lignes 54-55) et tutoie les philosophes (Mais qu'entends-tu par esprit ligne 19 ; Mais sais-tu , ligne 21 ; me dirais-tu bien , ligne 24 qui eux témoignent du respect et le vouvoient (Que me demandez-vous là ligne 19). [...]
[...] Conclusion En prenant l'initiative et restant maître du dialogue sur la nature de l'âme, Micromégas dénonce l'incohérence de plusieurs doctrines classiques. Invitant le lecteur à se méfier de toute forme de dogmatisme intransigeant, il prépare le dénouement avec la métaphore du livre tout blanc Grâce à son caractère scientifique et aux interrogations qu'il soulève, Micromégas est un conte tout à fait moderne et une œuvre de vulgarisation sur de graves questions philosophiques et scientifiques. Précurseur du genre de la science-fiction, il aborde la notion de relativité philosophique mais critique également la religion et la guerre. [...]
[...] Micromégas la réfute par l'absurde de façon tout aussi infantile (de la barbe au menton, lignes 18-19). En réponse, la pensée de Micromégas est socratique, chaque affirmation du philosophe est suivie d'une question du géant, qui contraint finalement l'adepte à avouer son ignorance. Ainsi, il sélectionne un mot dans chacune des affirmations du philosophe cartésien et lui demande d'en préciser la signification : Mais qu'entends-tu par esprit ? (ligne Mais sais-tu au moins ce que c'est que de la matière ? (ligne mais le fond de la chose, le connais-tu ? (lignes 24-25). [...]
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