Caractérisé par une intense effervescence philosophique, le XVIIIe siècle s'avère également être une période propice à la création théâtrale et romanesque. Une véritable « théâtromanie » y entraine de fait la floraison de genres nouveaux, qui exploitent et transforment des formes anciennes pour les adapter à une nouvelle atmosphère morale, sociale et idéologique. Placé au centre de débats d'idées, le théâtre est l'objet de profonds bouleversements, à l'image d'une société en mouvement. Né de la contestation des traditions dramaturgiques jusqu'alors en vigueur, le drame, genre « intermédiaire », « sérieux », est en partie théorisé par Diderot dans ses <em>Entretiens sur le Fils Naturel</em> (1757). D'autres dramaturges et théoriciens emboitent bientôt le pas à Diderot : Beaumarchais (<em>Essai sur le genre dramatique sérieux</em>, 1767) et Mercier, qui publie, en 1773, <em>Du théâtre</em>. Tous mettent puissamment en lumière les principes essentiels du drame, à commencer par l'exigence ternaire de vérité, de sensibilité et de moralité. Précurseur méconnu, Mercier est l'une des figures de proue, l'un des promoteurs les plus déterminés de ce nouveau genre ; une abondante production théâtrale fait pendant à ses textes théoriques. Dans <em>Du théâtre</em>, Mercier s'attache à exposer des idées audacieuses et à défendre sa propre théorie de l'art dramatique, posant avec force la question de la place, du rôle, des fins du théâtre. Il élabore une poétique du drame fort émancipée des formules traditionnelles et définit ce que devrait être une littérature moderne. S'efforçant de montrer combien il s'avère nécessaire de changer l'esprit et la fonction du théâtre, de rénover en profondeur le système dramatique, Mercier assigne au théâtre des objectifs plus ?nobles' que celui de simple divertissement, des objectifs qui reflètent puissamment ses propres préoccupations idéologiques (constantes...). Il conviendra ainsi de s'interroger plus avant sur les rapports de l'esthétique et de la morale. (...)
[...] Une véritable théâtromanie y entraine de fait la floraison de genres nouveaux, qui exploitent et transforment des formes anciennes pour les adapter à une nouvelle atmosphère morale, sociale et idéologique. Placé au centre de débats d'idées, le théâtre est l'objet de profonds bouleversements, à l'image d'une société en mouvement. Né de la contestation des traditions dramaturgiques jusqu'alors en vigueur, le drame, genre intermédiaire sérieux est en partie théorisé par Diderot dans ses Entretiens sur le Fils Naturel (1757). D'autres dramaturges et théoriciens emboitent bientôt le pas à Diderot : Beaumarchais (Essai sur le genre dramatique sérieux, 1767) et Mercier, qui publie, en 1773, Du théâtre. [...]
[...] Parallèlement à cet essoufflement, le public se renouvelle, passionné de théâtre. Le drame entend s'ouvrir à la multitude 157), à toutes les conditions, y compris les plus modeste (jusqu'alors passablement exclues), afin de représenter les problèmes quotidiens et contemporains, susceptibles d'être familiers au nouveau public, un public exigeant un certain naturel (nous verrons que cette notion, d'un point de vue pratique, est en fait discutable Mercier expose ici une conception assez novatrice, témoignant d'un certain esprit d'ouverture pour l'époque (où l'on écarte souvent le bas peuple du théâtre, à moins qu'on ne lui réserve des représentations spécifiques). [...]
[...] En ce sens, le sentiment (que Mercier qualifie de force invincible et puissante, qui soumet les êtres les plus rebelles devient la source même de la vertu. Mercier déclare lui-même qu'il s'agit, au théâtre, de trouver le vrai, par le coup électrique du sentiment Corrélativement, la philosophie de l'époque, qui diffuse ce qu'on a pu appeler une véritable morale du sentiment met puissamment en avant la sensibilité, placée au cœur de toutes les vertus par bien des philosophes des Lumières. [...]
[...] Dès lors, les dramaturges doivent tenir compte de ces évolutions et s'imprégner de l'âme de leur temps ; se dessine ainsi une aspiration de plus en plus profonde à une nouvelle forme, une nouvelle configuration dramatique. La critique littéraire prend acte de l'essoufflement des grands genres classiques : Diderot, Grimm, Voltaire, Rousseau ou encore Mercier, justement, pointent du doigt cette impression d'impasse générique et soulignent la nécessité de ne point emprunter la route battue par les dramaturges du XVIIe siècle notamment. Force est de constater qu'une telle décadence a largement favorisé l'avènement du drame. [...]
[...] Le drame ne saurait en aucun cas, pour lui, se réduire à un pur divertissement ; bien plus, le dramaturge, le Poète doit chercher à agir sur la sensibilité, à émouvoir, tout en s'adressant à l'intelligence du spectateur, lui donnant ainsi matière à penser : il recèle un message moral. Le théâtre devient, dans cette perspective, une tribune, un puissant instrument de propagande philosophique et sociale. Mercier le conçoit comme l''ecole des vertus et des devoirs du citoyens ; or, précisément, le théâtre aurait jusqu'alors failli à sa tache essentielle ; aussi convient-il de changer l'esprit et la fonction de l'art dramatique dans son ensemble. Ce faisant, Mercier s'inscrit dans une filiation assez riche. [...]
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