Un cadre propice à la rêverie : Jeanne est jeune, puisqu'elle a dix-sept ans, mais elle est à cet âge où l'on sort juste de l'adolescence et où on est déjà femme. La nuit est favorable à l'introspection, et dans cette campagne normande, dans cette propriété à quelques pas de la mer, en surplomb sur une falaise, au mois de mai, dans la solitude et la paix d'une atmosphère nocturne, elle "s'abandonn[e]" à ses pensées et à ses sens. On peut noter que ce cadre privilégié, avec des conditions idéales, évoque un univers romantique (...)
[...] Jeanne est touchante néanmoins, elle est jeune ce qu'elle ressent, ce qu'elle imagine est aussi vraisemblable. Conclusion : Cet extrait de la situation initiale nous permet donc de comprendre âme de Jeanne, l'héroïne de ce roman. Son exaltation et ses aspirations sont compréhensibles, elle est jeune, pleine de vie, romanesque, comme le sont la plupart des jeunes filles, d'autant plus qu'elle renait à la vie et à la liberté après des années passées au couvent. Jeanne rêve d'amour, et le texte fait comprendre qu'elle est capable d'une grande sensibilité et d'une grande sensualité. [...]
[...] Elle savait seulement qu'elle l'adorerait de toute son âme et qu'il la chérirait de toute sa force. Ils se promèneraient par les soirs pareils à celui-ci, sous la cendre lumineuse qui tombait des étoiles. Ils iraient, les mains dans les mains, serrés l'un contre l'autre, entendant battre leurs cœurs, sentant la chaleur de leurs épaules, mêlant leur amour à la limpidité suave des nuits d'été, tellement unis qu'il pénétreraient aisément, par la seule puissance de leur tendresse, jusqu'à leurs plus secrètes pensées. Et cela continuerait indéfiniment, dans la sérénité d'une affection indestructible. [...]
[...] Qu'elle possède l'illusion de sa jeunesse la rend sympathique au lecteur, mais on sent bien que la réalité risque de la décevoir. Jeanne est trop candide, elle ne connaît rien de la vie, sinon ce qu'elle a lu dans les romans, et elle est fragile. Ce personnage ressemble donc par bien des points à Emma Bovary, l'héroïne de Flaubert, mais elle s'en distingue aussi par le fait que Jeanne n'a pas d'autre ambition que de vivre simplement auprès d'un mari attentionné, aimant et chaleureux, qu'elle ne trouvera malheureusement pas. [...]
[...] Guy de Maupassant (1850-1893), Une Vie extrait du chapitre I. A 17 ans, Jeanne vient de sortir du couvent et se retrouve dans la propriété de ses parents, dans la campagne, sur la côte normande. Elle sort en pleine nuit claire, et songe à son avenir. Jeanne regardait au loin la longue surface moirée des flots qui semblaient dormir sous les étoiles. Dans cet apaisement du soleil absent, toutes les senteurs de la terre se répandaient. Un jasmin grimpé autour des fenêtres d'en bas exhalait continuellement son haleine pénétrante qui se mêlait à l'odeur plus légère des feuilles naissantes. [...]
[...] Il y a un certain naturel de la jeune fille, celui du désir, qui se manifeste d'autant plus facilement que dans cette situation elle peut s'abandonner sans contraintes. Enfin son exaltation est aussi traduite par l'emploi du passé simple. Le rêve éveillé et l'espoir : On comprend aisément, grâce au champ lexical de l'amour, renforcé par une gradation, souffle de bonheur libre d'aimer adorerait affection indestructible que la jeune femme aspire à cette rencontre de l'autre. Le narrateur précise même que ce sentiment est déjà antérieur, grâce à l'indication temporelle depuis deux ans qu'elle vit depuis longtemps cette attente, mais nuits d'été dans le dernier paragraphe, semble insinuer que cette rencontre est imminente. [...]
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