Dans ce passage, extrait de la scène 2 de l'acte 1 de L'Ile des esclaves de Marivaux, deux personnages, Iphicrate et Arlequin, un maître et son valet, abordent sur une île, après avoir fait naufrage et sont accueillis par Trivelin, le maître de cette île. Celui-ci les met au courant des règles bien particulières en cours sur l'île, puisqu'elles instituent l'inversion des rôles entre maîtres et esclaves et créent ainsi un monde utopique (...)
[...] Commentaire composé de la scène 2 de l'île des esclaves de Marivaux Dans ce passage, extrait de la scène 2 de l'acte 1 de l'île des esclaves de Marivaux, deux personnages, Iphicrate et Arlequin, un maître et son valet, abordent sur une île, après avoir fait naufrage et sont accueillis par Trivelin, le maître de cette île. Celui-ci les met au courant des règles bien particulières en cours sur l'île, puisqu'elles instituent l'inversion des rôles entre maîtres et esclaves et créent ainsi un monde utopique. Trivelin s'exprime en maître et cherche à convaincre les nouveaux venus du bien- fondé de leurs lois, ce que nous verrons dans une première partie. Après quoi nous nous interrogerons sur la critique sociale que cette utopie permet à Marivaux d'exprimer. [...]
[...] Cependant ce ne sont pas les menaces qui dominent : Trivelin veut convaincre du bien-fondé des lois de l'île et en cela se fait le porte- parole de ses compatriotes pour développer ses arguments. Tout d'abord il se montre habile en ayant recours au rappel historique : en rappelant les souffrances subies par leurs pères, qui expliquent leur conduite première fondée sur l'esprit de vengeance, il fait deux choses : il montre que son peuple d'anciens esclaves a su évoluer, se rendre à la raison, et sont donc des êtres doués de raison : la vengeance avait dicté cette loi ; de plus il prépare les esprits des deux nouveaux, à trouver douces les lois qui vont leur être communiquées : nous ne nous vengeons plus de vous, nous vous corrigeons Ainsi ceux-ci sont-il prêts à écouter avec une sorte de soulagement ce qui va suivre. [...]
[...] L'arbitraire et l'injustice sont d'autant plus flagrants que l'égalité de base entre les hommes est démontrée : c'est ce qu'il s'applique à faire en mettant dans la bouche d'un ancien esclave des propos inspirés par la raison, plus peut-être que ce qu'on pourrait attendre d'un maître ordinaire Donc Marivaux tente d'ouvrir des perspectives, dans l'espoir de faire un jour bouger les choses. Pour l'esclavage, il faudra attendre la déclaration des droits de l'homme en 1789 pour l'abolir en France (très momentanément puisque Napoléon le rétablit) puis enfin 1848. [...]
[...] Difficile, en effet, en ces temps de royauté absolue, de critiquer le régime et les abus qu'il cautionnait : la censure était une menace permanente et mieux valait critiquer à couvert. Tel La Fontaine qui utilise les fables animalières pour critiquer la cour et son roi, tel Voltaire plus tard qui utilisera le masque du conte oriental, Marivaux pousse ses critiques dans ses comédies et utilise à des fins diverses le stratagème du déguisement, assez divertissant pour masquer le côté plus sérieux. [...]
[...] Mais, il faut bien voir que Marivaux remet aussi en cause la relation arbitraire maître / valet, comme le fera après lui Beaumarchais, et plus largement une société très inégalitaire et très bloquée dans laquelle il est difficile d'évoluer. A travers ce texte qui expose avec une grande force de conviction les lois d'une société utopique et inversée par rapport à la réalité de l'époque, nous entendons non seulement la voix d'un ex- esclave, être sensé, ferme et néanmoins modéré mais aussi la voix de la raison qui sera celle de tous les intellectuels du XVIIIème siècle qui contribueront en fin de compte à la révolution de 1789. [...]
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