Manon Lescaut, Abbé Prévost, mort, passion, amour, désespoir
L'extrait étudié se situe à la fin du roman : Des Grieux est sur le point de terminer son récit d'un « malheur qui n'eut jamais d'exemple ». Suite à son duel avec Synnelet, le neveu du gouverneur, les amants fuient dans le désert et Manon y trouve la mort. Si Des Grieux peine à trouver les mots pour raconter cette disparition, il s'attarde en revanche sur l'enterrement de sa bien-aimée.
[...] » On peut s'attarder un instant sur la mention de cette épée brisée et inutile, qui symboliquement marque la fin des aventures du Chevalier, et, peut-être, sa mort. Cet extrait est donc le récit à la fois terrifiant et pathétique d'un homme qui enterre de ses mains la femme qu'il aime. De plus le texte témoigne de la vénération « folle » du Chevalier pour Manon. L.10-17 : L'enterrement « J'ouvris une large fosse . j'attendis la mort avec impatience. » L.10-12 : Dans un deuxième temps, DG fait le récit de l'enterrement proprement dit. [...]
[...] Cet ensevelissement est un arrachement : il ne peut laisser ce corps : « Je ne la mis dans cet état qu'après l'avoir embrassée mille fois, avec toute l'ardeur du plus parfait amour ». Des Grieux, idolâtre, fanatique presque, ne se sépare qu'à regret de son bien le plus précieux, comme le suggère la négation restrictive. Des Grieux et Manon rejoignent les figures de Tristan et Yseult ou de Roméo et Juliette. « Je m'assis encore près d'elle. Je la considérai longtemps. [...]
[...] Sa crainte de voir le corps de Manon « devenir la pâture des bêtes sauvages » renvoie également aux tragédies antiques (on songe à Antigone notamment). L.4-7 : L'entreprise cependant est difficile dans la mesure où il est lui-même à bout de forces : DG jette ses dernières forces dans la sépulture qu'il veut faire. L'enterrement est en une charge, un « office » qui revient au prêtre : Des Grieux endosse le rôle, en quelque sorte, de l'Abbé qu'il aurait dû devenir s'il n'avait pas connu Manon. [...]
[...] Manon Lescaut, L'enterrement de Manon - Abbé Prévost (1731) - En quoi ce récit terrible de l'enterrement de Manon est-il aussi poignant que sublime ? Brève introduction : L'extrait étudié se situe à la fin du roman : DG est sur le point de terminer son récit d'un « malheur qui n'eut jamais d'exemple ». Suite à son duel avec Synnelet, le neveu du gouverneur, les amants fuient dans le désert Manon y trouve la mort. Si Des Grieux peine à trouver les mots pour raconter cette disparition, il s'attarde en revanche sur l'enterrement de sa bien-aimée. [...]
[...] La phrase suivante : « La consternation profonde où j'étais et le dessein déterminé de mourir avaient coupé le cours à toutes les expressions du désespoir et de la douleur » le confirme et l'explique : Des Grieux est arrivé au bout de lui-même, au-delà du désespoir et de la souffrance Ainsi, à la fin de son récit, Des Grieux semble disparaitre dans une dernière évaporation de ses forces et de son être comme le traduisent la négation dans la principale, les verbes « demeurer » « être » « rester » qui sont, soit niés soit « rejetés » dans les relatives, ou encore le verbe « perdre ». Il meurt symboliquement, vide de ses larmes comme il le serait de son sang. Brève conclusion : L'Abbé Prévost fait de ce récit de l'enterrement de Manon un moment de littérature unique, à la fois terrible, morbide et pathétique. L'amour fou, la vénération idolâtre de Des Grieux pour Manon sublime ce récit lors même qu'il contrevient à toute morale, à toute raison. [...]
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