Manon Lescaut - Abbé Prévost (1731) - Le plaisir du romanesque repose-t-il sur une succession d'aventures extraordinaires ?

Thèmes abordés

Mémoires et aventures, Manon Lescaut, Abbé Prévost, plaisir littéraire, roman, aventure extraordinaire, chevalier Des Grieux, marquis de Renoncour, péripétie, dimension morale, moralité, ambigüité des personnages, amour, passion, trahison

Résumé du document

L'Abbé Prévost a vécu une histoire similaire à celle de son célèbre personnage, Le chevalier Des Grieux dans Manon Lescaut, nous pourrions donc imaginer qu'il présenterait le récit du jeune homme sous un point de vue objectif. Or, alors que l'auteur a lui aussi connu une vie de débauche de fuites et de délits, il prête sa plume à un personnage en parfaite opposition à cela pour la conter : le Marquis de Renoncour. Personnage principal de la série de romans Mémoires et aventures d'un homme de qualité qui s'est retiré du monde et narrateur de sa propre histoire. Renoncour décide dans le septième et dernier roman de centrer son récit sur de nouveaux personnages, le chevalier Des Grieux et Manon Lescaut, nous contant leurs aventures extraordinaires à travers le regard de Des Grieux, il n'en reste pas moins la seule raison pour laquelle celles-ci parviennent au lecteur.

Extraits

[...] Manon Lescaut - Abbé Prévost (1731) - Le plaisir du romanesque repose-t-il sur une succession d'aventures extraordinaires ? L'Abbé Prévost a vécu une histoire similaire à celle de son célèbre personnage, Le chevalier Des Grieux dans Manon Lescaut, nous pourrions donc imaginer qu'il présenterait le récit du jeune homme sous un point de vue objectif. Or, alors que l'auteur a lui aussi connu une vie de débauche de fuites et de délits, il prête sa plume à un personnage en parfaite opposition à cela pour la conter : le Marquis de Renoncour. [...]

[...] », alors que cette phrase semble être pour elle un moyen de justifier ses tromperies, elle cache une vie complexe et un avenir inexistant, choses dont Des Grieux n'a pas à se soucier. Rappelons que lorsque celui-ci était destiné à une vie de succès dans l'ordre ecclésiastique elle était quant à elle promise à une sombre existence enfermée dans un couvent « C'était malgré elle qu'on l'envoyait au couvent » p36. Par ce rappel de son origine sociale, Prévost parvient à présenter Manon comme une victime, une créature invoquant la pitié des lecteurs qui s'attachent à elle se demandant sans cesse quand ses malheurs s'arrêterons mais également jusqu'où ira-t-elle pour échapper à cette triste existence qui semble la guetter au bout du chemin. [...]

[...] Manon aime aussi ce qui lui fait pardonner le reste de son caractère. » Selon cet auteur, le plaisir du roman repose à la fois sur le caractère peu commun des personnages et leurs mésaventures mais aussi sur l'amour que ceux-ci portent l'un à l'autre puisqu'il est l'essence même de l'histoire, leurs péripéties ne peuvent existe sans l'amour. Ainsi, le roman ne tire pas seulement son succès de ses nombreuses aventures hors du commun mais aussi de la réflexion sur l'amour qu'il apporte à travers ses personnages que l'auteur fait tout pour rendre attachants. [...]

[...] Mais cette vie obscure et vagabonde n'est-elle pas ce qui rend ce livre si intéressant ? N'est-ce pas ce caractère surprenant et ambigu de l'histoire et ses personnages qui provoque le plaisir du lecteur. Finalement, le plaisir du romanesque repose-t-il sur une successions d'aventures extraordinaires ? C'est la question que nous nous poserons ici. Après avoir analysé comment l'ambigüité des personnages et leurs péripéties inhabituelles mènent au plaisir littéraire, nous verrons que l'intérêt du roman ne repose pas exclusivement sur ces éléments, pour nous interroger finalement sur sa dimension morale. [ . [...]

[...] Car en réalité faut-il mieux souffrir par amour ou souffrir d'être privé d'amour ? C'est une des questions à laquelle ce roman tente de répondre. Les deux personnages font des choix bien différents à cet égard, si Des Grieux choisit l'amour face à tout autre chose et semble même vouloir mourir s'il ne peut le posséder « Demande ma vie, qui est l'unique chose qu'il me reste à te sacrifier car mon cœur n'a jamais cessé d'être à toi », Manon est plus pragmatique et préfère être privée de celui-ci, se tournant sans cesse vers des hommes riches pouvant subvenir à ses besoins. [...]