Madame Bovary, Gustave Flaubert, l'ennui d'Emma, Emma, littérature, mise en scène, personnage, narration, quotidien, amour, ennui, objets symboliques
Commentaire composé.
Le texte à l'étude est tissé autour de descriptions précises et la narration du quotidien d'Emma, ce qui induit une temporalité cyclique propre à restituer l'ennui de la jeune femme. En effet, il nous est dépeint ici le décor de l'ennui d'Emma. Cette description passe par deux observations distinctes. C'est tout d'abord une observation minutieuse de détails matériels, ajoutant un effet de réel au texte, soit un certain réalisme. Ce réalisme passe notamment par des jeux de lumière : c'est la lumière passant à travers les carreaux, ou encore le détail de la rosée sur les choux du jardin, véritables ornements, "guipures d'argent avec de longs fils clairs qui s'étendaient de l'un à l'autre" (p.118). Le regard s'attarde ainsi au microscopique et aux détails : la rosée du matin, les cloportes dans le jardin, mais aussi les détails matériels de certains lieux, comme celui de la salle de bal ("rideau de taffetas rose, sous une grille de cuivre en arabesque" p.120). Cette minutie menée afin de restituer les détails ne sert pas réellement à faire avancer l'intrigue romanesque : pourtant, ces détails permettent de faire vrai, tout en insistant sur le caractère passif et observateur d'Emma. La jeune femme n'est pas en action, elle observe, emmurée dans son rôle de contemplatrice du monde qui l'entoure. Ce monde environnant, justement, est rendu réel par une autre observation : celle du quotidien qui entoure Emma, par les figures familières du village de Tostes. La description de la vie rurale du bourg se fait au travers de figures et de leurs actions du quotidien : le maître d'école ouvrant les auvents, le passage du garde-champêtre, le perruquier... Ces observations passent, tout comme les détails mentionnés plus haut, par une description précise, notamment dans le cas du perruquier et de sa boutique ainsi que de son accoutrement. On retrouve ici l'attention aux détails, soit aux couleurs et aux matières des objets.
[...] " (Madame Bovary,1856) p.122). "Emma devenait difficile, capricieuse" (Madame Bovary,1856) (p.121) : Emma devient changeante pour tenter de créer de l'imprévu dans sa routine cyclique. La transformation est donc aussi morale : "elle ne cachait plus son mépris pour rien, ni pour personne ; et elle se mettait quelques fois à exprimer des opinions singulières, blâmant ce que l'on approuvait, et approuvant des choses perverses ou immorales" (Madame Bovary,1856) (p.122). Ce changement moral induit un changement vis-à-vis de son mariage, et de son amour pour son mari. [...]
[...] (Madame Bovary,1856) (p.119). Le narrateur omniscient se charge de décrire les malheurs du perruquier, sur lequel on transpose aisément les propres désirs d'Emma : comme lui, elle rêve d'un monde qu'elle a connu une nuit chez le bal du marquis d'Andervilliers, et Rouen sera pour elle le lieu de l'échappatoire par l'adultère. Cet effet de transposition permet de décrire Emma sans le faire directement, et témoigne de l'omniscience du narrateur. La chute du passage, crée par la nouvelle d'Emma bientôt mère, témoigne aussi de cette présence du narrateur : "quand on partit de Tostes, au mois de mars, madame Bovary était enceinte" (Madame Bovary,1856) (p.123). [...]
[...] Le passage à l'étude est traversé d'un même sentiment, propre à Emma : l'ennui. Elle "sentait l'ennui plus lourd qui retombait sur elle" (Madame Bovary,1856) (p.119). Le terme "plus" est un indice qui montre qu'Emma s'ennuie aussi à l'extérieur, lors de sa promenade ; mais l'intérieur de la maison et de la chambre ou de la salle à manger représente le lieu de l'ennui. L'intérieur de la maison reflète ainsi dès lors l'intériorité de son esprit, occupé pleinement par l'ennui. [...]
[...] La remarque sur l'ignorance d'Emma et son désir de ce qu'elle ne connaît pourtant pas, semblent bien ne pas relever d'elle-même mais du narrateur, car il induit un recul critique qu'Emma, par ses comportements impulsifs jour ne buvait que de lait pur, et, le lendemain, des tasses de thé à la douzaine" (Madame Bovary,1856) p.121), semble difficilement permettre. Dès lors, la présence discrète mais permanente du narrateur omniscient permet de restituer avec subtilité l'ennui d'Emma. C'est lui qui met en œuvre le jeu temporel entre avancée et répétition, puisque l'extrait à l'étude s'ouvre sur un constat, celui de l'hiver difficile mais révolu, constat sur lequel le narrateur revient par la suite en décrivant sa répétition. Les lamentations du perruquier est un exemple frappant : "lui aussi, le perruquier, il se lamentait" (Madame Bovary,1856) (p.119). [...]
[...] " (Madame Bovary,1856) p.119) ou la visite de la mère d'Emma, ce qui ne vient guère la sortir de ce cycle d'ennui. Ainsi, les descriptions minutieuses et la narration du quotidien permettent un jeu temporel mettant en avant le caractère cyclique de la vie à Tostes, propre à expliquer l'ennui d'Emma. Néanmoins, ces nombreuses descriptions et ce traitement spécifique du temps induit un certain regard subjectif : quel est-il ? En effet, ici, le jeu d'énonciation mis en œuvre induit qu'il ne s'agit pas que du regard subjectif d'Emma mais bien aussi celui d'un narrateur omniscient, afin de rendre doublement l'ennui de celle-ci, à la fois par sa propre subjectivité et par le recul critique du narrateur. [...]
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