Les lilas et les roses, Le Crève-coeur - Louis Aragon, 1941

Thèmes abordés

Les lilas et les roses, Le Crève-Coeur, Louis Aragon, 1941, Seconde Guerre mondiale, caractère polysémique, armistice du 22 juin 1940, langage des fleurs, poésie, esthétisation des mots

Résumé du document

Ce poème est situé dans la deuxième moitié du recueil, qui on le sait est construit de manière chronologique. Ainsi ce poème décrit l'atmosphère qui suit la signature de l'armistice entre le Maréchal Pétain et Hitler. En effet, dans la bibliographie, il est spécifié que ce poème, (comme tous ceux qui suivent) a été écrit après l'armistice (elle-même signée le 22 juin 1940) et publié dans le Figaro en septembre. Le titre "Les lilas et les roses" semble indiquer un thème champêtre, voire romantique. En effet, dans le langage des fleurs, le lilas est la fleur utilisée pour symboliser le premier émoi de l'amour. De même, la rose est la fleur des amoureux. La rose est aussi un lieu commun en littérature, elle a inspiré de nombreux poètes et écrivains.

Par exemple au XIIIème siècle, Guillaume de Lorris écrit Le roman de la "Rose" qui est un long poème allégorique dans lequel la rose, objet de la quête, est le symbole de la perfection. Aragon utilise donc des lieux communs de la littérature afin d'émettre un critique sur cette signature qui signifie selon lui la fin de la joie et de la liberté. Comme le dit Sartres, "dévoiler c'est changer", ainsi nous pouvons nous demander en quelle mesure le poème d'Aragon transmet-il un message et si ce message est une fin en soi. Nous verrons comment Aragon dissimule des indices dans ces vers, ce qui lui permet de transmettre ses idées tout en évitant la censure.

Extraits

[...] Cette atmosphère lourde et presque sournoise est illustré par l'allitération en présente sur les vers 14 et 15 : Semblables aux missels des siècles disparus / Ni le trouble des soirs l'énigme du silence La répétition de cette sonorité évoque un sifflement doucereux, ralentissant le rythme général des vers et illustrant bien cette sorte de silence qui s'étire, contrastant avec la violence des combats à venir. Le vers 16 Les roses tout le long du chemin parcouru semble indiquer un paysage normal, champêtre et printanier. Cependant celui-ci prend une toute autre connotation dans le contexte dans lequel le poète écrit. En effet les roses ne sont pas des fleurs sauvages (ce sont des améliorations de l'églantier) ainsi leur présence n'est pas fortuite, elle est due à l'homme. [...]

[...] Le titre Les lilas et les roses semble indiquer un thème champêtre, voire romantique. En effet, dans le langage des fleurs, le lilas est la fleur utilisée pour symboliser le premier émoi de l'amour. De même, la rose est la fleur des amoureux. La rose est aussi un lieu commun en littérature, elle a inspiré de nombreux poètes et écrivains. Par exemple au XIIIème siècle, Guillaume de Lorris écrit Le roman de la Rose qui est un long poème allégorique dans lequel la rose, objet de la quête, est le symbole de la perfection. [...]

[...] Les lilas et les roses désignent aussi tous ces jeunes gens, encore dans la fleur de l'âge, dont la jeunesse se retrouve gâchée par la guerre. Et ni les deux amours que nous avons perdus désigne l'Alsace et la Lorraine, une des clauses de l'armistice de juin 1940 comporte justement l'annexion de l'Alsace-Lorraine. Par ce vers, Aragon exprime son patriotisme et son amour pour son pays et ses habitants. La structure circulaire que nous avions mise en avant lors de la deuxième strophe réapparaît ici, car ce dernier quatrain rappelle le premier et permet de conclure le poème. [...]

[...] D'ailleurs ces mots qui sont au premier abord anodin et généraux : un général et non pas le général, sont en fait très évocateurs pour les contemporains d'Aragon. En effet Sainte-Marthe est une petite commune du nord de la France, située dans le département de l'Eure et de la région Haute-Normandie, un général désigne bien-sûr le général Pétain et au vers suivant : une villa normande au bord de la forêt désigne le lieu proche de la signature de l'armistice. [...]

[...] Plusieurs raisons expliquent ces choix. Tout d'abord il voulait certainement éviter la censure. En effet, écrivant dans un contexte d'occupation, il était extrêmement délicat de critiquer le régime de Vichy et la collaboration. Mais d'autre part, cela correspond à une volonté d'esthétisation des mots et vers. En effet Aragon donne à voir autant qu'il fait ressentir. Par le biais des jeux de sonorités, de rythmes et de métaphores, nous ressentons à la lecture de ce poème une véritable atmosphère qui nous fait nous sentir proche du poète et de ses émotions. [...]