Laclos, "Les Liaisons dangereuses", Lettre 81 : commentaire linéaire

Résumé du document

Les Liaisons dangereuses de Laclos paraissent en 1782, c'est le roman d'un homme d'armes, un exemple de roman épistolaire, qui a attendu deux siècles pour être reconnu à sa juste valeur : le Vicomte de Valmont, amateur de libertinage et de femmes en particulier, fait un pari avec la Marquise de Merteuil : séduire la Présidente de Tourvel qui se veut un exemple de moralité depuis son veuvage. Valmont parviendra à ses fins mais, tombant dans le piège de l'amour, il périra finalement dans un duel.

Cette lettre est extraite de la seconde partie du roman, c'est la lettre 81 écrite par la Marquise de Merteuil au vicomte de Valmont, un peu plus d'un mois après le début de la correspondance. Cette lettre souligne que les anciens amants devenus complices deviennent des rivaux dans leur
guerre avide de conquêtes. La marquise a décidé de séduire un certain Prévan mais Valmont lui a conseillé précédemment de rester prudente pour ne pas se perdre dans cette liaison. Ce conseil, répété dans plusieurs lettres, entraîne la mauvaise humeur de la Marquise. C'est donc la colère qui se met à jour ici où la Marquise déclare sa féminité et se veut l'égal de l'homme et du séducteur (...)

Extraits

[...] Elle revient tout d'abord sur la tentative de séduire la Présidente de Tourvel, qualifiant cela 2 incroyable gaucherie Valmont est rabaissé parce que sa victoire est simpliste, d'une part par sa fragilité déconcertée par sa durée un moment par le caractère de sa conquête timide par l'affirmation de la facilité qui vous aime et par le gain apporté par cette victoire un regard repris immédiatement par une anaphore réductrice un seul regard l'épithète numérale réduit la victoire à l'absurde, celui qui se veut maître et conseiller ne semble pas un exemple à suivre. Le mépris est visible dans l'expression votre Présidente la Marquise sait déjà que Valmont s'est épris de la Présidente, ce qui augmente sa colère et sa jalousie. [...]

[...] La marquise continue d'affirmer sa supériorité dans l'opposition qu'elle établit entre les hommes et les femmes, Les Liaisons dangereuses sont aussi une guerre des sexes. Si la condition de la femme au XVIIIe siècle est restreinte, la marquise a su s'imposer et la suite de la lettre sera là pour illustrer la manière dont elle y est parvenue. Mais cette lettre témoigne aussi de l'orgueil qui la domine, pourtant elle établit un déplacement de cet orgueil sur Valmont et sur les hommes en général. [...]

[...] Au vrai, Vicomte, vos conseils m'ont donné de l'humeur, et je ne puis vous le cacher. Que pour masquer votre incroyable gaucherie auprès de votre Présidente, vous m'étaliez comme un triomphe d'avoir déconcerté un moment cette femme timide et qui vous aime, j'y consens ; d'en avoir obtenu un regard, un seul regard, je souris et vous le passe. Que sentant, malgré vous, le peu de valeur de votre conduite, vous espériez la dérober à mon attention, en me flattant de l'effort sublime de rapprocher deux enfants qui, tous deux, brûlent de se voir, et qui, soit dit en passant, doivent à moi seule l'ardeur de ce désir ; je le veux bien encore. [...]

[...] Les Liaisons dangereuses Laclos 1782 Lettres LXXXI, La Marquise de Merteuil au Vicomte de Valmont Que vos craintes me causent de pitié ! Combien elles me prouvent ma supériorité sur vous ! Et vous voulez m'enseigner, me conduire ? Ah ! mon pauvre Valmont, quelle distance il y a encore de vous à moi ! Non, tout l'orgueil de votre sexe ne suffirait pas pour remplir l'intervalle qui nous sépare. Parce que vous ne pourriez exécuter mes projets, vous les jugez impossibles ! [...]

[...] La raillerie se fait des plus mordantes avec l'espression figée cela dit en passant qui souligne la clarté d'esprit de la Marquise et en dévoile toute l'ironie. Le talent de Valmont est minimisé et annulé au final : la pointe ironique marque la condescendance de la Marquise. Dans un troisième reproche, elle cite Valmont lui-même pour lui retourner ses conseils, le langage devient l'arme de la Marquise qui retourne la situation à son avantage. Elle joue de l'hyperbole pour attiser la tonalité ironique. [...]