Fruit d'une fascination à la mode pour l'Orient, d'une importante documentation et d'une observation aiguisée de la société française, le roman épistolaire des Lettres persanes paraît en 1721 à Amsterdam ; Montesquieu ne donne pas son nom et tente d'authentifier sa fiction comme la traduction de véritables lettres écrites par des Persans « logés avec [lui] ». Ce détour lui permet de jeter sur la France un regard bien souvent critique. Après les lettres XXIV et XXXVII, où il est question plus précisément de Louis XIV, Usbek annonce dans la XCII la mort du roi et le début de la Régence de Philippe d'Orléans. En cinq paragraphes qui se dégagent progressivement de l'événementiel, c'est une réflexion politique que conduit Montesquieu, à travers le regard du Persan à Paris : dans cette lettre, l'auteur aborde le rôle essentiel des parlements, qu'il faut restaurer pour prétendre à une légitimité de l'autorité (...)
[...] Ce paragraphe donne l'autre sujet de la lettre et annonce l'analyse politique qui suit. Ces deux paragraphes restent ancrés dans l'événementiel de la lettre- bulletin, et consacrés à la mort de Louis XIV. Troisième paragraphe A travers le récit des faits, Usbek fait sentir le caractère des personnages royaux et va plus avant dans l'analyse politique. Les stratégies du roi et du régent sont expliquées par la relative, par l'adjectif habile dans le participe exposant qui peut renvoyer à la manière ou à la cause, et par une nouvelle relative : on remarque ainsi que le mouvement du paragraphe souligne la volonté de Louis XIV d'être seul au pouvoir et pour toujours, puisqu'à la première phrase répond tout ce qui suit la dernière relative. [...]
[...] EXPLICATION METHODIQUE Usbek, Rhédi, Venise Les prénoms et la ville suggèrent d'emblée l'exotisme et l'orient, comme le mois de la date donnée en fin de lettre, tirée du calendrier lunaire persan ; par un double mouvement, la lettre est écrite à Paris par un étranger, un Persan, et va repartir loin de la France, à l'étranger. Premier paragraphe La lettre XXXVII utilisait aussi si longtemps régné pour résumer le règne de Louis XIV ; ici la périphrase ne masque guère le roi, étant donné la date de la lettre. [...]
[...] Mais l'attaque brutale Ne crois pas et la litote (négation et restriction ici) disent à quel point il y a eu peu de réflexion morale, qui aurait concerné la condition humaine, celle des grands, par exemple, face au destin c'est ce qui lie ce paragraphe au précédent ne céder qu'au destin L'indéfini Chacun de la deuxième phrase vient s'opposer aux réflexions morales, comme l'universel s'oppose à l'intérêt particulier, que disent les pluriels ses affaires et ses avantages : l'indéfini rassemble dans une seule entité puissante tout l'égoïsme et le calcul de ceux qui peuvent profiter de la succession. Ces pluriels sont d'ailleurs très concrets et s'opposent aussi en cela à la dimension morale : tout le tragique évoqué par le destin est congédié. La dernière phrase se veut explicative, avec la proposition participiale à valeur causale, et les nombreux renseignements dispensés entre virgules : Usbek éclaire Rhédi sur les événements et sur un aspect de la monarchie française : la Régence. [...]
[...] Montesquieu conserve à cette magistrature sa majesté, avec l'image du temple fameux et de l'ancienne religion qui vient nuancer l'image des ruines et le premier adverbe toujours On sait que Montesquieu a participé activement au parlement de Bordeaux et qu'il y était très attaché : s'il dénonce ici une dégénérescence (ils ne sont plus que des tribunaux), il les magnifie dans une certaine solennité que crée aussi le mouvement final du paragraphe, très travaillé, avec un rythme ternaire bâti sur un parallélisme puissant : cédé + trois compléments + relative pour chacun ; les deux derniers membres insistent sur le parallèle, dans la structure identique de la relative tout inclus dans un passé composé). Ainsi, plus qu'une définition pour son ami lointain, cette image des parlements permet à Montesquieu-Usbek de déplorer la perte d'une fonction essentielle et solennelle. Le nom autorité apparaît deux fois dans ce paragraphe, en liaison directe donc avec le thème abordé. [...]
[...] Plus de vingt ans avant son œuvre majeure, et sa réflexion sur les divers types de gouvernement et sur la liberté politique, l'auteur commence à conduire sa réflexion philosophique grâce à la fiction littéraire. C'est donc avec raison qu'on a vu dans les Lettres persanes la préface spirituelle et hardie de l'Esprit des lois Louis XIV est mort le 1er septembre 1715. Abbas Ier le Grand régna de 1587 à 1629, remporta de nombreuses victoires sur les Turcs et fut un grand bâtisseur. Philippe, duc d'Orléans (1674-1723). Terme juridique signifiant annuler. Hauts tribunaux de Paris et des grandes villes de province. [...]
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