Voltaire, lettre au premier commis de la Censure Royale, état, religion, 20 juin 1733
François Marie Arouet, dit Voltaire, est un écrivain français du XVIIIe siècle, auteur de contes philosophiques (Candide, Zadig), de tragédies, d'ouvrages historiques (Siècle de Louis XIV). Il fait partie des philosophes du XVIIIe siècle qui mènent un certain nombre de combats conformes à leur idéal intellectuel : l'intolérance, le fanatisme, les violences inutiles (guerre et torture). Le Dictionnaire philosophique (1764), aussi appelé « La raison par l'alphabet », est une œuvre engagée dont les articles ne sont pas neutres et qui permet d'échapper à la censure
[...] L'utilisation d'antithèses, comme volailles de basse-cour qui rompt avec le caractère majestueux des aigles ou encore liberté honnête (ligne . Une dévalorisation burlesque du demandeur, l'écrivain, qu'il dégrade au rang de volailles de basse-cour. De plus, la lettre précise la connaissance du contexte littéraire de l'époque, l'associant indirectement à celui de l'Inquisition : s'il y avait eu une inquisition littéraire à Rome (ligne et rappelle l'exil de Pierre Bayle, philosophe et écrivain français contraint de s'exiler en tant que relaps à Genève puis aux Provinces-Unies (actuels Pays-Bas) lorsque Louis XIV fait fermer l'Académie de Sedan dans laquelle il est professeur. [...]
[...] On traite les livres de même, on prend quelques amis dans la foule. Il y aura sept ou huit mille controversistes, quinze ou seize mille romans, que vous ne lirez 20 point ; une foule de feuilles périodiques que vous jetterez au feu après les avoir lues. L'homme de goût ne lit que le bon, mais l'homme d'État permet le bon et le mauvais. Les pensées des hommes sont devenues un objet important de commerce. Les libraires hollandais gagnent un million par an, parce que les Français ont eu de l'esprit. [...]
[...] Contentez- vous de réprimer sévèrement les libelles diffamatoires, parce que ce sont des crimes ; mais tandis qu'on 10 débite hardiment des recueils de ces infâmes Calottes, et tant d'autres productions qui méritent l'horreur et le mépris, souffrez au moins que Bayle entre en France, et que celui qui fait tant d'honneur à sa patrie n'y soit pas de contrebande. Vous me dites que les magistrats qui régissent la douane de la littérature se plaignent qu'il y a trop de livres. C'est comme si le prévôt des marchands se plaignait 15 qu'il y eût à Paris trop de denrées : en achète qui veut. [...]
[...] Le courrier se transforme alors en une authentique apologie de pensée et d'expression, préparée au XVIe siècle par les humanistes qui avaient emboîté le pas à l'invention de l'imprimerie par Gutenberg (1468). [...]
[...] La liberté de publication : lignes 1 à 12 La liberté de publication est nécessaire au développement de la pensée et de l'art : une liberté honnête élève l'esprit, et l'esclavage la fait ramper (lignes 4). Elle permet aux écrivains d'avoir plus d'ambition et de réussite, échéance mise en valeur par la métaphore plumée qui autorise alors les volailles de basse-cour à devenir des aigles (lignes 2-3). Or, l'aigle n'est-il pas alors l'emblème des légions romaines et ne sera-t-il pas repris par Napoléon Ier qui en fera un symbole impérial ? [...]
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