En 1964, année où il obtient le prix Nobel de littérature qu'il refusera, il publie son autobiographie, Les mots où il raconte son enfance chez ses grands parents maternels puis à La Rochelle avec sa mère et son beau-père et comment il découvre l'existence par les mots dans la bibliothèque de son grand-père.
Le récit raconte avec beaucoup de recul et d'ironie la vie de l'enfant encensé par sa famille qui voit en lui une "merveille". Cet engouement va prendre fin, quand, à sept ans une coupe de cheveux révèle la laideur de l'enfant. Cet extrait raconte cette brutale prise de conscience (...)
[...] Un enchâssement de souvenirs Les deux phrases qui encadrent le récit un jour- j'avais sept ans c'était saper à la base ses futurs émerveillements présentent l'épisode du coiffeur comme un évènement marquant et soulignent son importance. Par ailleurs, l'auteur recourt à une stratégie de retardement: les trois premières lignes annoncent l'événement (le grand-père décide d'emmener son petit-fils chez le coiffeur, sans en prévenir la mère du garçon). Or, le récit des conséquences de cette coupe de cheveux se trouve différé dans le second paragraphe ; d'où la mise en valeur et la théâtralisation de l'évènement et de ses conséquences. [...]
[...] II/ La divulgation de la laideur de l'enfant et de l'imposture de sa famille 1. La tragi-comédie familiale L'importance de ce souvenir d'enfance est mise en valeur par la disproportion entre le résultat escompté et les conséquences effectives de la coupe de cheveux, beaucoup d'images contribuent à souligner cela : je regardai avec bienveillance mes boucles (.)Inexplicablement ternies comme l'image du garçon qui va brutalement se ternir aux yeux de sa famille. glorieux et tondu : représentation ironique du petit garçon fier d'exhiber sa nouvelle coupe de cheveux qui contrairement à ce qu'il pense l'enlaidissait. [...]
[...] La mère de Sartre, qui souhaitait certainement avoir une fille, élève son petit garçon comme une fillette on avait troqué sa fillette contre un garçonnet illusion favorisée par les belles anglaises qui voltigeaient autour de (ses) oreilles L'idée d'un changement de sexe accompagné du troc d'un enfant supposé beau contre une enfant manifestement laid, est également suggérée par la métaphore : on lui avait confié sa petite merveille, il avait rendu un crapaud La révélation de la mauvaise foi familiale Aussi bien dans son œuvre philosophique dans ses écrits romanesque, Sartre a souvent employé et illustré tout en critiquant la notion de mauvaise foi par laquelle il désigne les errements dans lesquelles se maintiennent les Hommes, la comédie que chacun se joue à lui-même et aux autres. C'est à la lumière de cette idée qu'il semble ici analyser le comportement des membres de sa famille. Les mots de merveille et de crapaud ainsi que le thème de la métamorphose de l'un en l'autre, appartiennent à l'univers des contes de fées, que Sartre pastiche avec humour. [...]
[...] Le récit raconte avec beaucoup de recul et d'ironie la vie de l'enfant encensé par sa famille qui voit en lui une merveille Cet engouement va prendre fin, quand, à sept ans une coupe de cheveux révèle la laideur de l'enfant. Cet extrait raconte cette brutale prise de conscience. On verra comment l'auteur raconte cet épisode banal en apparence et le met en valeur en en faisant un véritable rebondissement dans la comédie familiale. Nous montrerons par la suite en quoi cette coupe de cheveux est l'occasion d'une double révélation, celle de la laideur de l'enfant à lui- même et à sa famille et de la fin des illusions cultivées. [...]
[...] Enfin, cet extrait dénonce implicitement, l'illusion de l'enfant parfait que certains parents, comme la famille de Sartre entretient. Croire en un enfant exemplaire, c'est risquer d'avoir des déboires qui, pénibles pour les parents, le sont encore plus pour l'enfant. Conclusion : La stratégie et le ton adoptés par Sartre dans son autobiographie sont clairement discernables dans cet extrait: il analyse son enfance et le mode de vie de sa famille pour en identifier avec ironie les mystifications et les illusions. [...]
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