Introduction
Les choses, premier roman de Georges Perec publié en 1965, nous présente un couple - Jérôme et Sylvie - incarnation même du bovarysme moderne. Cette histoire des années 1960 se déroule au sein d'une société qui prône le bonheur matériel : l'auteur explore ainsi le quotidien et la place des objets dans celui-ci en fonction du désir qu'ils suscitent. La vie des deux personnages, racontée au passé, se retrouve alors limitée à un insatiable besoin de consommer dû à un attrait certain pour le luxe. Mais cette avidité les consume sans pour autant leur apporter quoi que ce soit. L'épilogue apparaît alors comme un passage devant clore une histoire qui, pendant six ans, a mené les deux amants de rêves en illusions sans véritable concrétisation. Mais à l'inverse, l'utilisation du futur produit l'effet d'un avenir ouvert sur un nouveau départ et déjà loué bien que non advenu.
On peut donc se demander en quoi la toute fin de cet épilogue des choses marque un tournant attendu dans la vie de Jérôme et Sylvie ?
On verra, dans un premier temps, que l'évocation faite du passé sert à produire une rupture avec ce dernier. Ensuite, on notera que l'avenir présenté peut être perçu comme la promesse d'un bonheur proche. Enfin, on s'attardera sur l'idée que cette fin de roman installe un subtil sentiment d'incertitude.
I ? Le passé : une évocation qui provoque la rupture avec celui-ci
1 ? Une rupture totale et définitive avec leur vie passée
- « en finir une fois pour toute » (p. 154) : Sylvie et Jérôme sont dans l'optique précise d'une nouvelle vie puisqu'elle est datée (début du mois de septembre).
- Le couple semble renoncer à leurs rêves. Comme une sorte de compromis, ils acceptent de s'installer enfin dans une stabilité, de rentrer dans le rang comme les autres.
- La rupture est présente à travers les verbes utilisés par l'auteur : quitter, abandonner, fuir ...
- Les personnages opèrent une véritable fuite en avant pour rompre sans aucuns remords avec leur passé. Cela est accentué par l'évocation de souvenirs négatifs (on peut illustrer cette idée avec l'expression « les jours sombres ») (...)
[...] La rupture est présente à travers les verbes utilisés par l'auteur : quitter, abandonner, fuir . Les personnages opèrent une véritable fuite en avant pour rompre sans aucuns remords avec leur passé. Cela est accentué par l'évocation de souvenirs négatifs ( on peut illustrer cette idée avec l'expression les jours sombres ) Un passé devenu encombrant pour les personnages Les protagonistes se disent fatigués par leur vie passée. Leur attitude prouve un début de réponse à toutes les questions qu'ils se posaient, notamment sur la manière de faire fortune. [...]
[...] Chacun peut ainsi s'imaginer une suite positive ou négative pour Jérôme et Sylvie. Les Choses se présente comme une recherche initiatique où les personnages font des erreurs, se laissent étouffer et manipuler par une société de consommation qui ne leur procure aucun bonheur. Le lecteur lui aussi, par le biais de l'épilogue, peut faire ses propres hypothèses, ses choix de lecture. C'est pourquoi Perec laisse une impression d'inachevé à la vie de ce couple qui ressemble à beaucoup dans la vie de tous les jours. [...]
[...] Leur réussite n'est alors que moyenne et non spectaculaire. Avec le temps, les personnages semblent entrés dans le moule : ce sont de petits bourgeois possédant quelques symboles de richesse en accord avec leur rêve de luxe ( cf un Chesterfield ou de la faïence Le lecteur dans cet ultime passage du livre a bien le sentiment que le couple se persuade que la vie bordelaise sera meilleure après l'échec de Sfax. Le dénouement leur paraît heureux mais cela est-il vrai ? [...]
[...] Le couple agit plus par obligation pour s'intégrer à la société que par volonté. On sent bien qu'ils n'atteindront jamais leur vie idéale décrite tout au long du roman. La paraphrase de Karl Marx tourne en dérision cette entreprise d'accomplir un résultat ( ici, la richesse ) par le biais d'une vérité. Le couple n'arrive en fait à rien. L'argent et le capital, qui sont les moteurs de la société de Jérôme et Sylvie, pèsent inconsciemment ou non sur leur conduite et faussent leurs aspirations. [...]
[...] Ils apparaissent heureux et en contact avec les choses tant espérées ( ils boivent du whisky et mangent avec des couverts massifs dans des assiettes écussonnées ) Un prélude au succès annoncé Le festin somptueux qui s'annonce est à la hauteur de leurs attentes et leurs désirs. Cette métaphore de l'avenir traduit la sensation pour le couple de se plonger dans quelque chose d'idyllique. Cette impression est différente pour le lecteur qui sait que c'est le désir de consommer qui rend ce futur si parfait. Ce sont les choses qui les entoureront qui leur apporteront satisfaction et non la vie simplement en elle-même. [...]
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