« Seigneurs, vous plaît-il d'entendre un beau conte d'amour et de mort ? » (Joseph Bédier).
La légende médiévale de Tristan et Iseut a fait jaillir dans l'esprit de l'opinion publique toute une imagerie propre à la littérature médiévale, que remet en question la thèse des romantiques évoquée par Stanesco et le philologue Zink. Des épopées chevaleresques, la dévotion chrétienne du chevalier modèle, l'amour courtois particulièrement mis en valeur chez Thomas, autant de caractéristiques qui tendent à classer la matière tristanienne dans un contexte conventionné strictement au prototype de la littérature médiévale. En quoi ne pourrait-on pas déranger cette vision académique pour venir y ajouter quelques éléments insolites qui donneraient un nouveau souffle à la légende ? Le conformisme du « on » dont parlent les deux théoriciens gagnerait sans doute à être teinté des points de vue originaux des acteurs de l'époque romantique. Le XIXe a ainsi perçu l'amour inconditionnel pour la dame inaccessible comme un facteur de destruction humaine, tant au niveau moral que physique. La piété du chevalier viendrait en fait en seconde place, le culte pour l'être aimé - ainsi que les essences mystiques qu'il dégage - s'octroyant la première. Enfin, l'enthousiasme des romans courtois n'est pas pour autant détruit par l'omniprésence de l'attribut funeste qu'on prête à l'amour : même dans la mort, il se peut que le bonheur se cache...
[...] Le désir de mort simultané des amants A. La mort : un fantasme pour le couple en souffrance B. Le couple maudit protégé par une force mystique C. L'amant sacralisé III. La plénitude enfin retrouvée A. La mort faucheuse devenue utopie : le couple réuni à jamais B. Le dévouement à l'être aimé : primauté sur la survie C. L'amour éternel dans l'au-delà : un modèle idéalisé Conclusion Introduction Seigneurs, vous plaît-il d'entendre un beau conte d'amour et de mort ? [...]
[...] (Folie Tristan de Berne P.282) Identifié au spleen il jalonne l'œuvre de Béroul, mais aussi celle qui porte le nom de Folie Tristan d'Oxford Ainsi, en proie au suicide lors de son transfert au bûcher, Tristan implore les gardes de le laisser prier une dernière fois dans une chapelle isolée. Il semble pleinement conscient, voire déterminé à mourir : Près est mes termes de finer. (Béroul, P 66) Tristran surjurne en sun païs, Dolent, mornes, tristes, pensifs. Purpenset soi ke faire pot, Kar acun confort lu estot: Confort lu estot de guarir U si ço nun, melz volt murir. [...]
[...] Enfin, l'enthousiasme des romans courtois n'est pas pour autant détruit par l'omniprésence de l'attribut funeste qu'on prête à l'amour : même dans la mort, il se peut que le bonheur se cache I. La dangerosité de la relation amoureuse A. L'amour inconditionnel pour la dame : un amour impossible La légende de Tristan et Iseut n'a cessé d'inspirer les romantiques au qu'ils soient anglais, Allemands ou Français. Réécritures, peintures, traductions voire même musique, avec l'Opéra de Wagner, Tristan et Isolde (1854), l'intérêt que le roman a suscité chez ces artistes doit beaucoup à la corrélation paradoxale existant entre l'amour (la vie, le bonheur, la lumière) et la mort (sombre, tragique, destruction). [...]
[...] Tant s'entraiment de bone amor, L'un por l'autre ne sent dolor. (Béroul, P.84) Dans la version de Thomas, l'ambigüité est nettement perceptible entre le mal causé par le corps et le manque de l'être aimé. En effet, sur son lit de mort, Tristan confie à Kaherdin le motif de son agonie, qui s'avère être l'absence d'Iseut : El cuer en ad mult grant dolur, Car mult li greve la langur, Le mal, la puür de la plaie ; Pleint sei forment et mult s'esmaie, Cart mult l'anguise le venim. [...]
[...] Corina Stanesco, dans le dossier du Tristan et Iseut de Béroul (préfacé par Phillippe Walter et paru en 2000) souligne l'aspect inhabité que prend la forêt du Morrois, lieu d'exil des amants, territoire isolé où tout est silence et inertie. C'est un contraste évident avec les romans de Chrétien de Troie dans lesquels la forêt est le théâtre de toutes les péripéties. Dans leur périple rebelle, ils rencontrent cependant la figure pieuse d'Ogrin, qui rappelle la connexion inévitable entre le pêché de l'amour parjure (charnel ou non). [...]
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