Dissertation sur une citation de Gérard Genette, L'utopie littéraire, Figures I.
[...] De plus, en supposant que l'auteur parvienne à exprimer exactement sa pensée, il faudrait, pour que celle-ci soit comprise comme l'auteur le souhaite, imaginer un lecteur qui possède la même expérience, la même culture, les mêmes références que l'auteur, un lecteur qui mette derrière chaque mot employé par l'écrivain, la même connotation que ce dernier. Or personne, à part l'auteur lui-même, ne peut répondre à de telles conditions. L'auteur ne serait d'ailleurs peut-être pas à même d'interpréter son œuvre de manière juste. En effet, le texte est l'objectivation de l'auteur dans le monde, il est un autre lui-même, et personne ne peut prétendre connaître parfaitement sa propre intériorité. Certains critiques ont à ce propos évoqué la possibilité d'analyser les grandes œuvres selon les thèses psychanalytiques. [...]
[...] Il faudrait donc ne pas enfermer le texte dans la biographie de l'auteur, dans le contexte de son époque, mais l'ouvrir sur l'extérieur pour actualiser ses potentialités de significations. Cependant, qu'entend-on par extérieur ? Il semble que le texte puisse s'inscrire dans un ensemble de textes, qui fondent à eux tous ce qu'on peut appeler un Esprit de la littérature, où ne sont plus étudiés les significations conférées à un texte par son créateur, mais plutôt celles créées par les échos que le textes entretient avec tous les autres textes: L'Œuvre appartient dès sa naissance (et peut-être avant) au domaine public, ne vit que de ses relations innombrables avec les autres œuvres dans l'espace sans frontières de la lecture (Genette, L'utopie littéraire Il semble donc que les œuvres entretiennent un lien les unes avec les autres. [...]
[...] Il y a donc une rupture entre l'œuvre elle-même et le fait qu'elle ait été écrite par quelqu'un, comme si une fois écrite, elle se développait indépendamment de son auteur. En effet, selon Jorge Luis Borges (que cite Genette), l'auteur s'efface complètement derrière son œuvre : sa langue, son identité ne sont que pures contingences et seule l'œuvre survit au passage du temps. Toutes les œuvres se rassemblent en un tout, que Borges nomme la mémoire générale de notre espèce : elle incarne l'immortalité des différents textes, et leur unité semble permettre d'en préciser le sens. [...]
[...] Le dénouement montre donc la toute-puissance de l'auteur, qui détient la vérité et qui contrôle le chemin du lecteur pour y parvenir. Cependant, dans des textes appartenant à un autre genre, l'auteur semble n'exister que par le fait qu'il exprime le texte. En dehors du fait qu'il ait écrit, il n'en sait pas toujours plus sur le sens du texte que son lecteur. Ainsi, les textes religieux des prophètes rendent compte de paroles qui leur ont été divinement transmises par une révélation. [...]
[...] Il y a donc, au sein de la mémoire générale de notre espèce dont parle Borges, une infinité de possibilités de sens. Dans cette mise en relation générale des uns avec les autres, les livres peuvent donc fructifier produire du sens. En effet, les œuvres entre elles s'enrichissent, tout comme le dit bien la notion d' inter textualité ou de trans textualité : le sens se forme en traversant les différentes œuvres, se créé entre elles. L'inter textualité représente l'ensemble des relations qu'un texte littéraire entretient avec un autre ou avec d'autres, tant au plan de sa création (par la citation, le plagiat, l'allusion, le pastiche ) qu'au plan de sa lecture et de sa compréhension, par les rapprochement qu'opère le lecteur (le Petit Larousse 2006). [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture