Francis Ponge (1899-1988) est un poète du XXe siècle original et un peu à contre-courant de son époque, qui refusait même le terme de « poète ». Ses « proêmes » rejettent toute classification mais s'intéressent aux choses anodines qui nous entourent (objets), que l'on doit débarrasser de leur apparente banalité que la familiarité ou l'habitude ont imposée. Ces « choses » nous parlent, elles créent un langage. C'est ce langage que Ponge travaille en linguiste, en philologue, qu'il veut à la fois poétique, scientifique et ludique, (« objeu »), en refusant tout lyrisme. <em>Le Parti pris des choses</em> est son plus célèbre recueil, et son titre repose sur un paradoxe, associant la pensée à la matière inerte, mais on peut comprendre qu'il s'agit de considérer qu'un langage se crée toujours entre le sujet et l'objet, et que ce qui nous est extérieur nous est aussi essentiel, fonde notre parole. Publié en 1942, il réunit pourtant des textes écrits près de vingt ans plus tôt, pour la plupart. Ceux-ci s'apparentent à de savoureux exercices de style concernant des objets ou des éléments naturels où le matérialisme de l'écrivain côtoie aussi l'irrationnel et l'imaginaire.
« Le Papillon » est un poème en prose composé de cinq paragraphes assez courts, proches du verset, où l'on assiste à une description (qui est aussi une narration et une définition) ludique et originale de l'insecte.
Ce texte semble proposer une approche relativement novatrice et touchante de l'animal.
Nous verrons qu'il propose tout d'abord une description en apparence ordinaire mais ludique du papillon, puis qu'il s'appuie sur une poétique moderne et originale.
I-Une description en apparence ordinaire, mais ludique de la vie d'un papillon :
A. Une description quasi scientifique : le titre évoque un insecte généralement considéré par l'homme comme un symbole de liberté, de renaissance, de légèreté, qui attire par sa beauté, ses couleurs, mais qui incarne aussi une vie très éphémère (...)
[...] Francis Ponge (1899-1988), Le Parti pris des choses (1942). Le Papillon Lorsque le sucre élaboré dans les tiges surgit au fond des fleurs, comme des tasses mal lavées, un grand effort se produit par terre d'où les papillons tout à coup prennent leur vol. Mais comme chaque chenille eut la tête aveuglée, et laissée noire, et le torse amaigri par la véritable explosion d'où les ailes symétriques flambèrent. Dès lors le papillon erratique ne se pose plus qu'au hasard de sa course, ou tout comme. [...]
[...] Conclusion : A l'image de ce recueil, et de l'écriture particulière de Francis Ponge, ce poème à la fois sobre et ludique apporte une touche de fraîcheur à ce portrait de papillon, dans sa vérité biologique comme dans sa simplicité attachante et esthétique. C'est donc ce langage qui séduit en premier lieu chez Ponge, comme si l'objet lui-même suggérait son propre discours, ce qui était un des objectifs de l'auteur. La matière verbale doit traduire la rage de l'expression titre d'un de ses recueils, en se préservant de tout lyrisme. [...]
[...] Ce texte semble proposer une approche relativement novatrice et touchante de l'animal. Nous verrons qu'il propose tout d'abord une description en apparence ordinaire mais ludique du papillon, puis qu'il s'appuie sur une poétique moderne et originale. I-Une description en apparence ordinaire, mais ludique de la vie d'un papillon : A. Une description quasi scientifique : le titre évoque un insecte généralement considéré par l'homme comme un symbole de liberté, de renaissance, de légèreté, qui attire par sa beauté, ses couleurs, mais qui incarne aussi une vie très éphémère, comme le peint le poème de Lamartine dans ses Nouvelles méditations poétiques (1823). [...]
[...] Cette description où l'humour est présent : très vite le papillon est assimilé à un animal désordonné, sans déterminisme, ce qu'indique l'adjectif erratique Son insouciance est soulignée à plusieurs reprises, avec l'expression au hasard de sa course ou la proposition il arrive trop tard connotant la maladresse. La personnification péjorative du lampiste lui donne un côté débonnaire, mais ce mot peut être aussi compris dans son sens premier, celui qui fait surgir la lumière des fleurs-lampes La comparaison étonnante du début du texte, comme des tasses mal lavées apporte aussi de la dérision. Les tournures familières ou tout comme et d'ailleurs n'importe tendent à banaliser le portrait. [...]
[...] C'est ce langage que Ponge travaille en linguiste, en philologue, qu'il veut à la fois poétique, scientifique et ludique, objeu en refusant tout lyrisme. Le Parti pris des choses est son plus célèbre recueil, et son titre repose sur un paradoxe, associant la pensée à la matière inerte, mais on peut comprendre qu'il s'agit de considérer qu'un langage se crée toujours entre le sujet et l'objet, et que ce qui nous est extérieur nous est aussi essentiel, fonde notre parole. Publié en 1942, il réunit pourtant des textes écrits près de vingt ans plus tôt, pour la plupart. [...]
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