Le Guépard, roman publié en 1958 par Guiseppe Tomasi Di Lampedusa, construit son intrigue autour d'une famille d'aristocrates siciliens à la fin du XIXème siècle : les Salina. La noblesse vue et analysée à travers le personnage de Don Fabrizio connaît un point d'orgue lors de la scène du bal qui marque l'entrée d'Angelica dans « le monde ». Cette scène mémorable du roman est tout d'abord caractérisée par le faste du Palais des Ponteleone. Puis, le regard las du Guépard permet un regard critique sur ce microcosme pour finalement se détacher de la masse festive et sombrer dans une méditation sur la Mort.
[...] Le Colonel semble être un homme d'honneur qui s'agenouille devant son ennemi et lui baise la main, geste réservé au Pape. De plus, Pallavicino dresse un portrait positif de Garibaldi, qui même blessé au pied, reste un homme respectable. Derrière ce récit, se pose une question majeure : Victor-Emmanuel II de Savoie a-t-il manipulé Garibaldi de manière à conserver la monarchie ? Par ailleurs, Pallavicino prédit que d'autres chemises viendront, préfigurant sans le savoir l'ombre fasciste incarnée par les chemises brunes de Mussolini. [...]
[...] À ce faste sensuel répond le luxe ostentatoire des douze candélabres en vermeil présents dans le Palais. Dans ce Palais, se côtoie le monde composé de 200 représentants de l'aristocratie. C'est en cela que la visite d'Angelica revêt toute son importance et qu'il faut éviter les faux pas. Tancredi fait des recommandations à Angelica avant la visite et c'est pourquoi on la voit commenter avec goût le mobilier des Ponteleone ou encore leurs pâtisseries. C'est d'ailleurs son habileté à complimenter son entourage qui lui forgera lors de ce bal, une réputation de femme de goût. [...]
[...] Le narrateur d'ailleurs les compare à Roméo et Juliette et l'on ne peut dès lors plus douter du sort qui les attend. Encore une fois un jeu d'écho souligne que rien n'est éternel : on peut ainsi comparer le début du bal, marqué par le luxe et la beauté des participants, à la conclusion de celui- ci qui s'achève sur des haleines lourdes bien loin des parfums pénétrants à la violette de Carolina et Caterina. L'ennui de Don Fabrizio s'étant transformé en humeur noire, celui-ci s'interroge sur la mort et plus particulièrement sur sa propre fin, qui marquerait celle du monde, au sens que plus rien n'existerait pour lui. [...]
[...] La scène du bal est cruciale dans la construction du récit : elle est un portrait fin et précis de la noblesse de l'époque avec ses codes et son double langage, mais elle permet aussi de replacer le roman dans son contexte politique, sous-jacent au texte, en interrogeant le rôle de Garibaldi. Finalement, cette scène préfigure la mort du Prince Salina, que la fatalité rattrape. Cette scène essentielle permet de redoubler l'intensité tragique de la partie suivante qui marque les adieux au monde du Prince Salina. [...]
[...] n'est-ce pas une manière de souligner qu'il se détache déjà de la vie ? De même, alors que le Prince s'isole et observe la mort du juste de Greuze, il en perçoit toute l'intensité érotico- morbide. Quand le couple Tancredi / Angelica le regardent, seule l'insouciance se lit dans leurs regards : ils n'ont pas conscience de la mort ou d'un au-delà alors que Don Fabrizio imagine sa dépouille pendue dans le caveau familial. Finalement, la scène du bal est construite suivant une gradation : au glas d'agonie à leur arrivée, succèdent les boeufs écorchés dont les entrailles sont tournées vers les cieux. [...]
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