Hugo et sa famille, lors de leur séjour à Jersey, organisèrent des séances de spiritisme (tables tournantes) au cours desquelles ils entraient en communication, avec les « âmes » des animaux. Ils en éprouvèrent une immense pitié à l'égard des animaux et ils recueillaient chez eux les animaux les plus divers rencontrés au cours de leurs promenades. Un jour, le beau-frère de Léopoldine, la fille d'Hugo, sauva un crapaud que des enfants lapidaient : il le leur enleva et le porta dans un champ, se prétendant « le grand samaritain des crapauds » (...)
[...] Enfin la brute est rapprochée de son contraire la douceur (v.143-144) Notons enfin au tout début de cet extrait, la métaphore qui illustre la bonté de l'idiot : diamant du charbon : le diamant est du carbone pur dont la lumière étincelle sur un fond de noirceur, comme la bonté de l'âne illumine l'idiotie que, bien à tort, on attribue à cet animal. (à noter les deux diérèses qui font éclater les sonorités de I-DI-OT et DI-A-MANT) Quel but poursuit Hugo en rapprochant ainsi les contraires? [...]
[...] Le goût de l'antithèse, à moins que ce ne soit son amour des animaux, a entraîné V. Hugo à présenter un argument contestable. Le dernier argument en faveur des damnés, est un exemple pris chez les humains : il s'agit du rapprochement entre la brute et la douceur qui est ici personnifiée puisque la brute se révèle être la soeur de la douceur : la grâce (au sens religieux du terme) peut illuminer la brute pour qu'elle devienne l'égale de l'étoile éternelle qui brille constamment dans la douceur. [...]
[...] La bonté, vertu suprême qui unit la création à son créateur. Comment atteindre cette vérité suprême, saisir le sens de la sainte énigme ? V. Hugo résume en un vers le secret de la sainte énigme avec cette brièveté et cette concision qui caractérise les préceptes religieux : Crois, pleure, abîme-toi dans l'insondable amour! (v. 155). C'est une leçon d'humilité adressée au penseur, qui lui prescrit de croire et non de raisonner, c'est-à-dire, de s'abandonner à la contemplation du mystère de l'univers, qui révèle partout la présence de l'amour, dont la première manifestation est la compassion envers toute souffrance. [...]
[...] Veux tu trouver le vrai sous nos brumes maudites? V. Hugo veut faire comprendre qu'il est des vérités qui sont plus sensibles au cœur qu'à la raison. Le philosophe, le penseur recherchent la vérité par la réflexion et le raisonnement. Mais les vérités sur lesquelles ils méditent ne sont pas, aux yeux de Hugo, les vérités les plus importantes pour l'homme; l'âne est plus saint que le philosophe parce que son comportement prouve qu'il sait d'instinct que la première des vertus morales, c'est la pitié. [...]
[...] Le poème Le crapaud est une illustration parfaite de cette métaphysique hugolienne. On comprend mieux maintenant pourquoi, ce sont des êtres vils, comme l'âne ou le crapaud, qui sont le plus à même de nous dévoiler la sainte énigme : leur expérience de la souffrance a développé chez eux le sentiment de la pitié; c'est la leçon qu'ils nous donnent. La pitié n'est qu'une manifestation de la bonté, c'est-à-dire de l'amour qui doit amener l'ensemble de la création à se réconcilier avec le Créateur. [...]
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