Écrit en 1908, Le brasier est le premier d'une série de trois poèmes parue initialement sous le titre Le Pirée (nom de l'autel du feu chez les Perses), qui deviendra le titre actuel dans la version définitive. En 1907, le poète vient de rencontrer Marie Laurencin et cette période sentimentale faste est à l'origine d'une sorte de renouveau pour lui. Occupant une place de choix à ses yeux, il le dira "son meilleur poème sinon le plus immédiatement accessible", le définissant comme l'exemple d'un lyrisme neuf et humaniste. Parcouru par le thème du feu régénérateur, ce poème illustre un nouvel art poétique défini par la pureté, l'unité et la vérité (celle de la création poétique). Il marque une étape dans l'évolution personnelle de l'auteur (...)
[...] ÉTUDE ANALYTIQUE Introduction Guillaume Apollinaire (1880-1918) est l'un des plus grands poètes français du début du XXe siècle, inventeur du calligramme (terme de son invention désignant ses poèmes écrits en forme de dessins et non de formes classiques en vers et strophes), chantre du cubisme et précurseur du surréalisme dont il a forgé le nom. En 1913, à l'âge de 33 ans, il publie son premier recueil de poèmes, Alcools, qui fait écho aux Paradis artificiels de Baudelaire. La légende dit que c'est au dernier moment avant la mise sous presse qu'Apollinaire décida de supprimer totalement la ponctuation d'Alcools. Outre qu'elle favorise une diction plus fluide, elle produit également des ambiguïtés riches de sens. [...]
[...] Enfin, Le brasier peut être considéré comme un intermédiaire entre Zone, premier poème du recueil, symbolisant plutôt une descente aux Enfers et Vendémiaire, dernier poème du recueil. C'est parce qu'il rencontre le feu purificateur du brasier que le poète peut remonter à la lumière, jusqu'au chant triomphal de Vendémiaire. [...]
[...] Au contact de ce feu solaire (Mon âme au soleil se dévêt, vers l'âme se purifie et redevient elle-même, loin de l'artifice représenté par les vêtements. - cette vision négative de l'amour est rendue sensible par l'image du jardin de supplice (vers 16 à 20) avec sa végétation luxuriante où la destruction de la femme passe par le motif de la décapitation et du corps morcelé : Dans la plaine ont poussé des flammes Nos cœurs pendent aux citronniers Les têtes coupées qui m'acclament Et les astres qui ont saigné Ne sont que des têtes de femmes Le passé équivaut à la mort, tandis que le feu est source de vie, symbolisé par l'image violente des têtes coupées (vers 18) amorcée au vers 4 (Ce Passé ces têtes de morts). [...]
[...] C'est cette lumière que le poète contemple. Mais ce monde divin va être affecté par une dégradation : la lumière est ainsi reprise par l'expression ô mon amie (vers 46) qui associe le monde divin et le monde féminin de la trahison. Cette association sert le rapprochement de l'image du masque et du théâtre : J'ose à peine regarder la divine mascarade (vers dans lequel l'auteur suggère qu'il n'y a pas de vérité dans l'au-delà mais un fantastique jeu d'illusions. [...]
[...] Ainsi, dans la première partie du poème, il livre au feu, d'abord extérieur à lui (J'ai jeté dans le noble feu, vers puis en lui-même, tout ce qui constitue un obstacle à son évolution. Cette noblesse suggère une adoration mystique et se trouve liée à sa fonction purificatrice : - le passé est constitué des images d'êtres chers (L'amour est devenu mauvais, vers 13) et le poète souhaite se délivrer de cet amour qui l'enchaîne. - l'image des Centaures (vers suggère que cet amour est dominé par des forces primitives sensuelles. [...]
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