En 1820, Lamartine publie dans son recueil Les méditations poétiques un poème très personnel qu'il intitule « Le lac ». Revenu sur les bords du lac du Bourget où il a connu la femme aimée Elvire, Lamartine se retrouve seul. Atteinte d'une grave maladie, celle-ci n'a pu le rejoindre. Cette douloureuse expérience lui inspire alors une élégie, c'est-à-dire une plainte, sur le temps qui passe. Que peut le poète face à la fuite du temps ?
[...] Nous voguions en silence ; On n'entendait au loin, sur l'onde et sous les cieux, Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence Tes flots harmonieux. Tout à coup des accents inconnus à la terre Du rivage charmé frappèrent les échos ; Le flot fut attentif, et la voix qui m'est chère Laissa tomber ces mots : "Ô temps ! Suspends ton vol, et vous, heures propices Suspendez votre cours ! Laissez-nous savourer les rapides délices Des plus beaux de nos jours ! [...]
[...] Tout d'abord, cette fuite du temps apparait comme tragique. La force inéluctable et inexorable de cette fuite est mise en valeur de plusieurs façons. Pour cela, Lamartine utilise l'interrogation rhétorique comme le montrent les vers 3-4 Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges Jeter l'ancre un seul jour ? l'Alexandrin au rythme solennel, ainsi que l'enjambement qui amplifie le rythme du poème. Cette fuite inéluctable est également mise en évidence à travers la métaphore filée maritime des vers et 35 : «Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges Jeter l'ancre un seul jour ? [...]
[...] L'harmonie de la nature et du couple est mis en valeur à travers les vers 11-12 : Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes Sur ses pieds adorés. Le silence est alors le complice de la communication des cœurs tandis que les flots harmonieux du vers 16 sont à l'image du couple. Au vers 19, l'expression Le flot fut attentif montre que celui-ci est personnifié. Tandis que la nostalgie amoureuse est chantée par le poète, c'est le bonheur de l'amour qui est chanté par la voix d'Elvire. [...]
[...] De plus, ce lac est dépositaire et garant du passé. En effet, c'est une nature sauvage, chère aux romantiques, et pérenne, c'est-à-dire éternelle. L'univers minéral et liquide non soumis au temps à l'échelle humaine est mis en évidence au vers 9 : Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes, Cette idée est d'autant plus renforcée par la triple répétition de ainsi dans la troisième strophe : Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes, Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés, vers 10, Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes vers 11. [...]
[...] de l'heure fugitive, Hâtons-nous, jouissons ! et Il coule, et nous passons La répétition du verbe aimer montre qu'il s'agit d'un amour fort mais fragile et donc d'autant plus précieux. Le poème Le lac est emblématique du romantisme par son lyrisme qui se répand dans de nombreuses strophes et par son titre qui chante un lieu culte. Ce poème passé à la postérité illustre le pouvoir de la poésie à surmonter la fuite du temps, notamment par la célébration de l'amour. [...]
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