- Les personnages ne sont pas précisément décrits, aucun détail de leur costume ni de leur visage n'est indiqué, comme s'ils étaient l'incarnation de l'archétype du prince et de la princesse des contes de fée. La seule caractéristique sur laquelle s'attarde la narratrice est la beauté des deux personnages, comme en témoigne l'importance de ce champ lexical : "ce qu'il y avait de mieux fait et de plus agréable à la cour" (l.1-2), "sa beauté et sa parure" (l.5), "l'air brillant" (l.12), "sa beauté" (l.14), "une parfaite beauté" (l.29), "une mine et une grâce si admirables" (l.40-41), "l'air de sa personne" (l.44).
- Qui plus est, cette beauté de la princesse de Clèves et de M. de Nemours est renforcée par l'utilisation de tournures superlatives, ce qui souligne l'idéalisation des personnages :
. "ce qu'il y avait de mieux fait et de plus agréable à la cour" (l.1-2) : superlatifs.
. "une parfaite beauté" (l.29) : adjectif hyperbolique.
. "une mine et une grâce si admirables" (l.40-41) : adverbe intensif "si".
- Enfin, le cadre et les circonstances choisis contribuent aussi à la valorisation des personnages : l'évocation des personnalités de la cour d'Henri II présentes et le rappel de leurs titres de noblesse participent à la glorification des protagonistes (ils sont les plus beaux parmi les plus nobles) : "ce prince" (l.1), "Mme la Dauphine" (l.2), "Le roi et les reines" (l.15-16), "Le chevalier de Guise" (l.31). La précision temporelle apportée par l'incise "surtout ce soir-là" (l.11) met en évidence le caractère exceptionnel des circonstances. Enfin, le lieu, le palais du "Louvre" (l.5), a quelque chose de majestueux, presque de féérique (...)
[...] Mme de Clèves y vit le duc de Nemours avec une mine et une grâce si admirables qu'elle en fut encore plus surprise. Les jours suivants, elle le vit chez la reine dauphine, elle le vit jouer à la paume7 avec le roi, elle le vit courre la bague8, elle l'entendit parler ; mais elle le vit toujours surpasser de si loin tous les autres et se rendre tellement maître de la conversation dans tous les lieux où il était, par l'air de sa personne et par l'agrément de son esprit, qu'il fit, en peu de temps, une grande impression dans son cœur Mme la Dauphine : l'épouse de l'héritier du trône d'abord : à première vue, tout de suite surprise : étonnée 4. [...]
[...] L'auteur souligne l'idée d'un avant et d'un après la rencontre, qui va modifier le cours de l'histoire : Cette princesse était d'une parfaite beauté et avait paru telle aux yeux de M. de Nemours avant qu'il allât en Flandre ; mais, de tout le soir, il ne put admirer que Mme de Clèves. (l.30) Le changement brusque et radical dans l'attitude de M. de Nemours est mis en évidence à la ligne 30 par la ponctuation forte suivie de la conjonction de coordination mais marquant l'opposition, par le complément circonstanciel de temps de tout le soir et par la tournure négativo-restrictive ne que L'ébranlement de la personnalité provoqué par le coup de foudre est rendu par le champ lexical des émotions violentes : surprise (l.11), grand étonnement (l.13), surpris (l.14), trouble (l.33), touchée (l.34), surprise (l.42), grande impression dans son cœur (l.46). [...]
[...] Je crois, dit Mme la Dauphine, qu'elle le sait aussi bien que vous savez le sien. Je vous assure, madame, reprit Mme de Clèves, qui paraissait un peu embarrassée, que je ne devine pas si bien que vous pensez. Vous devinez fort bien, répondit Mme la Dauphine ; et il y a même quelque chose d'obligeant6 pour M. de Nemours à ne vouloir pas avouer que vous le connaissez sans l'avoir jamais vu. La reine les interrompit pour faire continuer le bal ; M. de Nemours prit la reine dauphine. [...]
[...] de Nemours et Mme de Clèves perturbe aussi le cours de l'histoire du roman. Les mots du chevalier de Guise pour qualifier la première rencontre de M. de Nemours et de Mme de Clèves relèvent d'ailleurs du vocabulaire romanesque : une aventure qui avait quelque chose de galant et d'extraordinaire (l.36) B. L'hypocrisie et les dangers de la cour En mettant en lumière la cour comme un lieu où l'on se donne en spectacle, Mme de Lafayette fait ressortir le poids de cette société de conventions, où l'individu ne peut échapper aux regards et aux jugements et où il peut devenir le jouet d'autrui : c'est le roi qui demande à Mme de Clèves de danser avec M. [...]
[...] Cette princesse était d'une parfaite beauté et avait paru telle aux yeux de M. de Nemours avant qu'il allât en Flandre ; mais, de tout le soir, il ne put admirer que Mme de Clèves. Le chevalier de Guise, qui l'adorait toujours, était à ses pieds, et ce qui se venait de passer lui avait donné une douleur sensible. Il le prit comme un présage que la fortune destinait M. de Nemours à être amoureux de Mme de Clèves ; et, soit qu'en effet il eût paru quelque trouble sur son visage, ou que la jalousie fît voir au chevalier de Guise au-delà de la vérité, il crut qu'elle avait été touchée de la vue de ce prince, et il ne put s'empêcher de lui dire que M. [...]
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