Tout d'abord, la situation du passage est quelque peu particulière. En effet, M. de Nemours est célibataire et Mme de Clèves est veuve : l'union morale est donc permise. Ensuite, les personnages sont seuls dans la même pièce, pièce dans laquelle tous deux se livrent leurs sentiments les plus intimes et plus particulièrement Mme de Clèves car son monologue témoigne de sa profonde introspection. La confiance qui règne entre les deux leur permet donc de s'avouer leurs sentiments sans aucune retenue (...)
[...] Je vous en ai trop dit pour vous cacher que vous me l'avez fait connaître et que je souffris de si cruelles peines le soir que la reine me donna cette lettre de Madame de Thémines, que l'on disait qui s'adressait à vous, qu'il m'en est demeuré une idée qui 40 me fait croire que c'est le plus grand de tous les maux. Par vanité ou par goût, toutes les femmes souhaitent de vous attacher. Il y en a peu à qui vous ne plaisiez, mon expérience me ferait croire qu'il n'y en a point à qui vous ne puissiez plaire. Je vous croirais toujours amoureux et aimé et je ne me tromperais pas souvent. [...]
[...] Ma destinée n'a pas voulu que j'aie 20 pue profiter de ce bonheur; peut-être aussi que sa passion n'avait subsisté que parce qu'il n'en aurait pas trouver en moi. Mais je n'aurais pas le même moyen de conserver la vôtre, je crois même que les obstacles ont fait votre constance. Vous en avez assez trouvé pour vous animer à vaincre et mes actions involontaires, ou les choses que le hasard vous à 25 appris, vous ont donné assez d'espérance pour ne vous pas rebuter. - Ah! [...]
[...] de Clèves et du tumultueux M. de Nemours a pour but de faire culpabiliser ce dernier afin qu'il renonce à sa passion. Elle emploie en effet le mot bonheur ligne 20, qui s'oppose avec malheur ligne 12, termes qu‘elle emploie pour caractériser son amour avec son mari et sa passion avec M. de Nemours. Tout l'éloge que Mme de Clèves est obligée de faire à son mari défunt montre qu'elle est acculée, qu'elle seule ne peut pas résister à la passion et qu'en quelque sorte elle se cache derrière un argument inattaquable. [...]
[...] Mme de Lafayette La Princesse de Clèves Au dix-septième siècle, être auteur dans la bonne société européenne n'était pas vraiment une qualité dont on pouvait se vanter. La Princesse de Clèves fut publié en mai 1678, sans nom d'auteur, chez l'éditeur Claude Barbin. L'extrait dont nous allons parler se situe au moment de l'aveu que fait Mme de Clèves à M. de Nemours, son amant. Mme de Lafayette appartenant au mouvement du classicisme, on trouve dans le passage toutes les marques de bienséances, de raison et d'équilibre. [...]
[...] Je crois devoir à votre 5 attachement la faible récompense de ne vous cacher aucun de mes sentiments et de vous les laisser voir tels qu'ils sont. Ce sera apparemment la seule fois de ma vie que je me donnerai la liberté de vous les faire paraître; néanmoins je ne saurai vous avouer, sans honte, que la certitude de n'être plus aimée de vous comme je le suis, me paraît un si 10 horrible malheur que, quand je n'aurai point de raisons de devoir insurmontables, je doute si je pourrai me résoudre à m'exposer à ce malheur. [...]
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