Représenter, dépeindre, poser une réflexion sur l'attitude de l'homme face à la vie, face à la mort, et face à une volonté en lutte avec la fatalité, tel aurait pu être le but d'André Malraux en écrivant La condition humaine. À l'heure où est publié le roman, en plein entre-deux-guerres, le jeune écrivain a déjà eu l'occasion de fouler le sol de nombre de pays étrangers : Italie, Allemagne, États-Unis, Inde, Afghanistan ou Indochine. Cette expérience, loin d'avoir exercé nulle influence dans la vie de Malraux, fut, au contraire, déterminante dans sa vision de l'homme. Il fut témoin d'une impressionnante diversité culturelle où se déclinent différentes conceptions du monde, de l'homme, ainsi que du sens qu'il doit donner à sa vie. De fait, la réflexion sur l'existence, suscitée par les révolutionnaires des écrits de Malraux, peut elle-même être considérée comme une transposition au roman du débat intérieur qu'a pu connaître l'écrivain au travers de ses voyages. Inspiré par le massacre de Shanghai de 1927, en pleine Chine révolutionnaire, La condition humaine nous livre autant une philosophie de vie qu'une réflexion intérieure au travers des péripéties épiques que connaissent les personnages-clés du récit, tel Kyo (...)
[...] S'ils sont conscients de leur destin, ils n'en oublient pas pour autant ce pourquoi ils ont lutté : au-delà d'idéaux certains, l'espoir d'un avenir qui aurait pu, à leurs yeux, être meilleur pour leurs enfants, se retrouve emblématiquement dans ce passage. Les condamnés sont à la fois humanistes et affligés : ils ont lutté pour l'avenir de leurs proches, mais sentent qu'il ne peut désormais qu'être sombre pour eux. Au tragique de la situation des hommes se rajoute donc le tragique de la situation de leurs familles, ce pourquoi le chuchotement de la douleur se prolonge jusqu'au fond de la nuit (l.8). [...]
[...] Cette expérience, loin d'avoir exercé nulle influence dans la vie de Malraux, fut, au contraire, déterminante dans sa vision de l'homme. Il fut témoin d'une impressionnante diversité culturelle où se déclinent différentes conceptions du monde, de l'homme, ainsi que du sens qu'il doit donner à sa vie. De fait, la réflexion sur l'existence, suscitée par les révolutionnaires des écrits de Malraux, peut elle-même être considérée comme une transposition au roman du débat intérieur qu'a pu connaître l'écrivain au travers de ses voyages. [...]
[...] C'était dans ce préau séparé de tous par les mitrailleuses, que la révolution, quel que fût son sort, quel que fût le lieu de sa résurrection, aurait reçu le coup de grâce ; partout où les hommes travaillent dans la peine, dans l'absurdité, dans l'humiliation, on pensait à des condamnés semblables à ceux-là comme les croyants prient ; et, dans la ville, on commençait à aimer ces mourants comme s'ils eussent été déjà des morts . Entre tout ce que cette dernière nuit couvrait de la terre, ce lieu de râles était sans doute le plus lourd d'amour viril. Gémir avec cette foule couchée, rejoindre jusque dans son murmure de plaintes cette souffrance sacrifiée . [...]
[...] Humanistes, leur résignation actuelle ne doit cependant pas supposer un défaitisme qui aurait précédé l'emprisonnement : au contraire, tous étaient empreints d'idéaux, comme nous le montre Kyo. Il est ici représentatif du héros de roman ayant un regard rétrospectif sur son action au cœur d'un moment funeste. Ainsi que Malraux nous le présente, Kyo, presque calme, aurait combattu pour ce qui [ ] aurait été chargé du sens le plus fort et du plus grand espoir phrase toute empreinte d'un idéalisme caractéristique d'un révolutionnaire, les verbes soulignant que même voué à une mort certaine, Kyo d'une certaine manière, eut un impact sur l'Histoire, sur le futur. [...]
[...] Le fait qu'ils soient, déjà ici, considérés comme morts alors qu'ils sont plutôt dans l'attente de cette dernière (le plus-que-parfait du subjonctif eussent été déjà des morts le suggérant), renforce une certaine fatalité de leur condition : ils ont agi ou tenté d'agir par le passé, mais ne peuvent désormais plus revenir en arrière ou aller vers l'avenir Ô prison, lieu ou s'arrête le temps l.1), ne peuvent donc qu'attendre la mort dans tout ce que leur état actuel a de désespéré. Accepter leur condition semble donc être la seule chose qu'ils soient ici en possibilité de faire. [...]
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