Le courtisan, ou le favori, est à la fois un personnage politique et une figure littéraire. Le théâtre a souvent représenté ses agissements (songeons à Narcisse dans le Britannicus de Racine) tandis que Du Bellay le fustigea dans son célèbre sonnet Les singes de cour. Dans son Discours de la servitude volontaire, publié partiellement en 1574, La Boétie en propose également un portrait peu flatteur lorsqu'il expose l'organisation du pouvoir du tyran et ses ramifications.
Problématique :
Nous analyserons comment La Boétie, dans un discours polémique, recourt à un registre fortement satirique pour dénoncer un mode de gouvernance corrompu.
Nous analyserons initialement le fonctionnement de ce réquisitoire puis nous nous intéresserons à la satire du favori ainsi proposée.
I - Un réquisitoire contre un pouvoir ramifié :
Si la tyrannie revient à une gouvernance fondée sur le principe du UN contre Tous, ce système n'est possible que par l'entremise des "petits tyranneaux", des favoris, qui contribuent à asseoir et à renforcer ce pouvoir et qui permettent sa diffusion. C'est "le ressort et le secret de la domination, le soutien et le fondement de toute tyrannie".
Le terme "ressort" évoque une mécanique (comme une horlogerie) et c'est bien cette mécanique implacable du pouvoir que La Boétie vise à dénoncer ici.
A - Une organisation pyramidale contestable :
La Boétie fonde son réquisitoire sur deux démarches argumentatives : un raisonnement logique, une démonstration d'idées et une démonstration imagée avec le recours à l'image extrêmement concrète de la tumeur qui gagne du terrain. Cette image appartient au domaine de la maladie, ce qui conduit le lecteur à considérer cette gouvernance comme maladive, viciée. Elle facilite également la compréhension du discours par le plus grand nombre.
Ces favoris occupent une place importante puisqu'un très petit nombre, "quatre ou cinq", assure le pouvoir et la protection du tyran (...)
[...] La Boétie, Discours de la servitude volontaire /Lecture analytique :depuis J'en arrive maintenant à autant de petits tyranneaux Introduction : Le courtisan, ou le favori, est à la fois un personnage politique et une figure littéraire. Le théâtre a souvent représenté ses agissements (songeons à Narcisse dans le Britannicus de Racine) tandis que Du Bellay le fustigea dans son célèbre sonnet Les singes de cour Dans son Discours de la servitude volontaire, publié partiellement en 1574, La Boétie en propose également un portrait peu flatteur lorsqu'il expose l'organisation du pouvoir du tyran et ses ramifications. [...]
[...] Il s'agit pour l'auteur de donner à entendre combien ce pouvoir est sournois. On conçoit alors aisément pourquoi ce même favori représente moins un véritable soutien qu'un incontestable danger pour le tyran ainsi que La Boétie le développera plus loin. Conclusion : Ce passage permet donc à La Boétie de compléter son portrait de la tyrannie et de ses rouages. Après la mise en accusation du peule, il se livre en effet à un violent réquisitoire contre les favoris qui tiennent en leurs mains ambitieuses et avides les nombreuses clefs du pouvoir et qui constituent un poison, une lie acide, tant pour les peuples que pour le tyran. [...]
[...] Usant du registre satirique et de nombreux paradoxes, il expose une vision assez novatrice, mais fortement polémique, d'une société pyramidale viciée dans laquelle le lecteur averti peut reconnaître sans conteste l'image de la monarchie française du XVI°. Fait au Marin, le 21 janvier 2012 par Sabine Ariscon, agrégée de Lettres Modernes. [...]
[...] Ses motivations sont contestables : L 28-29 ceux qui sont possédés d'une ambition ardente et d'une avidité notable - on note à ce titre les termes avidité L 15/ gains et faveurs L 22 - le jeu de LA BOÉTIE sur le terme possédés qui renvoie au diable : ils sont animés par le MAL. Ces favoris monnayent le pouvoir, mais il s'agit d'une fausse monnaie puisqu'elle est corrompue et au service de la corruption ainsi qu'en témoigne l'expression s'exempter des lois et des peines Le courtisan cherche à vivre au-dessus des lois. Le favori usurpe le pouvoir et n'agit qu'en son nom. [...]
[...] - Il joue avec la syntaxe : non certes pour réorganiser la justice, mais pour donner de nouveaux soutiens à la tyrannie L'effet de balancement (non certes pour mais pour) est renchéri par le jeu sur l'opposition des termes justice et tyrannie qui souligne alors l'injustice de la justice. De cette façon, les institutions se trouvent progressivement viciées (comme un corps par une tumeur). Mais tout ceci n'est possible que parce que les motivations du favori sont elles-mêmes condamnables, ce qui nous amène à nous intéresser au portrait satirique du courtisan que LA BOÉTIE nous livre ici. II La satire du favori : LA BOÉTIE nous propose en filigrane un portrait fort dépréciatif du favori. [...]
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