La scène 5 de l'acte V est singulière à plus d'un titre. D'abord, au niveau de l'écriture : en 1633, lors de la première écriture de la pièce, elle constituait la scène finale (Éraste tuait notamment Clindor dès le début et Isabelle mourait à la fin). Mais aussi dans sa représentation scénique, puisqu'elle a été représentée dans ces deux versions. Enfin, scène charnière, elle permet le retour de la pièce dans le genre de la comédie.
En effet, dans l'Examen, Corneille écrivait : « Le cinquième [acte] est une tragédie ». De fait, l'essentiel du cinquième acte est une tragédie, dont la dernière scène ramène le lecteur-spectateur dans l'univers de la comédie.
I- Un faux dénouement
En théorie, le dénouement est « un événement qui tranche le fil de l'action par la cessation des périls et des obstacles, ou par la consommation du malheur » (Marmontel). Si les événements principaux suggèrent une scène de dénouement, plusieurs notes dissonantes laissent entendre le contraire.
a- Le thème de la mort
Les événements principaux de cette scène sont l'assassinat de Clindor (Madame, je suis mort, et votre amour fatale / Par un indigne coup aux enfers me dévale, vers 5-6) et celui de Rosine, la princesse d'Angleterre (Je meurs, mais je me trouve heureuse en mon trépas / Que du moins en mourant je vais suivre tes pas, vers 7-8) (...)
[...] CLINDOR 5 Madame, je suis mort, et votre amour fatale Par un indigne coup aux enfers me dévale ROSINE Je meurs, mais je me trouve heureuse en mon trépas Que du moins en mourant je vais suivre tes pas. ÉRASTE Florilame est absent, mais durant son absence C'est là comme les siens punissent qui l'offense ; C'est lui qui par nos mains vous envoie à tous deux Le juste châtiment de vos lubriques feux. ISABELLE Réponds-moi, cher époux, au moins une parole ! C'en est fait, il expire, et son âme s'envole ! 15 Bourreaux, vous ne l'avez massacré qu'à demi ! [...]
[...] Les deux derniers vers de la réplique, et notamment l'antithèse lubriques feux (vers annonce le retour à la comédie. De fait, la figure de style oppose clairement l'adjectif lubriques, qui relève d'un vocabulaire vulgaire et péjoratif inadapté à la tragédie, au substantif feux, qui lui dénote un caractère galant et précieux. Cette antithèse cristallise la répulsion et le dégoût d'Éraste pour la relation qu'Isabelle et Clindor entretiennent. L'obscénité apparaît double : bien sûr l'illégitimité de cette relation, mais aussi la différence des rangs sociaux (hautement condamnable à l'époque). [...]
[...] Corneille, L'Illusion comique, Acte V scène 5 ÉTUDE ANALYTIQUE Introduction Pierre Corneille (1606-1684) est un dramaturge français. Ses pièces font surtout écho aux tournures du Grand Siècle et il y reflète les valeurs comme l'honneur et les grandes interrogations d'alors, sur le pouvoir, la guerre civile ou la lutte pour le trône. Jusqu'à la période baroque, le théâtre est cantonné à la comédie et à la farce du Moyen-âge. Reprenant certains personnages de la commedia dell'arte, Corneille tente un renouvellement du théâtre par la tragi- comédie, genre théâtral baroque par excellence. [...]
[...] En effet, celui-ci doit en particulier être complet et informer sur le sort définitif des personnages. Si le fait que le spectateur-lecteur n'a aucune information définitive, notamment par des didascalies, sur l'expérience des spectres parlants mise en place par Alcandre contredit déjà cette définition, la réplique de Pridamant qui, gagné par l'émotion et victime de l'émotion, s'exclame : Hélas ! il est perdu ! (vers met sur la voie de la révélation de l'illusion. Jusque-là spectateur passif, mais croyant voir son fils assassiné, il intervient dans l'action représentée. [...]
[...] La scène 5 de l'acte V est singulière à plus d'un titre. D'abord, au niveau de l'écriture : en 1633, lors de la première écriture de la pièce, elle constituait la scène finale (Éraste tuait notamment Clindor dès le début et Isabelle mourrait à la fin). Mais aussi dans sa représentation scénique, puisqu'elle a été représentée dans ces deux versions. Enfin, scène charnière, elle permet le retour de la pièce dans le genre de la comédie. En effet, dans l'Examen, Corneille écrivait : Le cinquième [acte] est une tragédie De fait, l'essentiel du cinquième acte est une tragédie, dont la dernière scène ramène le lecteur-spectateur dans l'univers de la comédie. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture