Dans un texte consacré aux difficultés du passage de la minorité à la majorité, Kant a pour objectif de circonscrire ces difficultés et de suggérer un dépassement possible.
La question qui préside à l'élaboration du texte étant : "comment se fait-il que le plus grand nombre soit sous la dépendance du plus petit nombre ?" (...)
[...] Le majeur étant d'autre part celui qui refuse d'être asservi comme il refuse d'asservir à son tour, on peut se demander si celui-ci existe bien tant ce désir de domination, cette soif de pouvoir semble lié à une situation initiale à laquelle nul n'échappe. On peut répondre à cela que la dépendance de l'enfant est aussi culturelle et historique que naturelle ; elle est en effet très variable selon les sociétés. Une société qui prolonge cet état installe durablement la majorité des hommes dans la minorité qui se prolonge par habitude. [...]
[...] Ce texte démystificateur, sondant les causes de la minorité prolongée affirme que tous peuvent devenir autonomes, qu'il n'y a pas de délégation possible de la pensée. Ce qui nous engage à la vigilance à l'égard de nous-mêmes. Cependant, l'existence même du majeur nous étant apparue comme problématique voire douteuse, ne faut-il pas simplement retenir de ce texte son aspect programmatique ? Il s'agirait en effet de considérer que l'accès à la majorité n'est jamais acquis mais quelque chose que nous devons vouloir sans cesse, attentif au désir quasi naturel de dominer l'autre. [...]
[...] Le calcul auquel se livre le mineur pour échapper à sa responsabilité, qui suppose la liberté (de penser et d'agir) n'est pas si bon qu'il y paraît. Ceci est d'autant plus évident lorsque l'on pense à l'action. Les mineurs ne veulent pas prendre le risque là encore d'errer, de faire le mauvais choix, de prendre la mauvaise décision. Ils s'en remettent à un tuteur et se croient en sécurité. En réalité, le tuteur peut être de mauvais conseils et si le berger garde et élève des moutons, c'est pour mieux les vendre ou les dévorer. [...]
[...] Résumons-nous et dressons le portrait du tuteur : il a soif de pouvoir ; il fait croire qu'il est un bon berger, un bon conducteur ; il ne satisfait que lui-même en commandant ; il joue sur un réflexe de peur ; son existence et son statut sont liés à son ombre le mineur. Ce qui le distingue du majeur. Le majeur est celui qui n'est ni mineur ni tuteur tel que celui-ci a été décrit. En d'autres termes, il se commande à lui-même sans commander aux autres ; il obéit à sa propre loi : il est autonome. [...]
[...] Pour grandir physiquement, il n'y a rien à vouloir, cela se fait comme on dit " naturellement comme s'il suffisait de se laisser aller à sa spontanéité naturelle, à son être naturel, de suivre le cours des choses, d'y être tout simplement inscrit, inscrit dans la nature en tant qu'être naturel. Si la majorité dans sa totalité était naturelle, tous seraient ou deviendraient majeurs. Or, cela n'est pas le cas. Quant aux causes repérées, elles ne peuvent donc relever de la nature : nous serions tous paresseux et lâches, ce qui ne s'observe pas. D'autre par, ces causes désignent des défauts moraux, sont considérer comme des vices. Or, la nature n'est ni bonne ni mauvaise : elle est axiologiquement neutre. [...]
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