Dans ce texte qui porte sur le thème de la liberté, Kant examine les rapports entre la liberté et les lois morales à travers la question de savoir si nous sommes capables de vaincre nos penchants et, si nous le pouvons, par quels moyens.
Question qui soulève le problème suivant : de deux choses l'une, ou bien nous ne sommes pas capables de nous conduire autrement que sous l'empire de nos penchants, de nos passions, de nos désirs, auquel cas nous ne sommes pas libres (...)
[...] Toutefois, on pourrait trouver que la démonstration n'est pas probante : on pourrait objecter en effet que s'il ne cède pas à son penchant, c'est parce qu'il a peur de mourir. Or, si tel est le cas, il cède à une autre passion : la peur ou l'instinct de survie. Mais vaincre une passion sous la force d'une autre, ce n'est pas être libre à l'égard des passions, ce n'est pas se déterminer librement. En somme, il semble que cette fiction ne prouve rien du tout au sujet de la liberté. [...]
[...] La menace dont il fait l'objet lui donnerait la force de le réprimer. Ce qui signifie donc qu'il avait tort d'affirmer qu'il ne pouvait pas lui résister et que sa conduite était dictée par ce désir. Ce qui signifie aussi et surtout qu'il est libre puisqu'il peut empêcher ce désir de déterminer sa conduite. La mise à l'épreuve de la puissance des désirs révèle donc qu'ils ne sont pas irrépressibles et donc qu'ils ne suppriment pas notre liberté, qui est toujours entière. [...]
[...] Mais que peut bien valoir cette révélation de notre liberté si elle tient dans une éventualité ? Qu'est-ce qu'une révélation qui n'est pas un avènement effectif ? N'est-elle pas simplement une certitude sans objet, une illusion ? En effet, le passage de la possibilité de ne pas mentir à l'acte même de ne pas mentir n'est pas le simple passage à l'acte d'une puissance qui n'attend que l'occasion de s'effectuer. S'il n'était que cela, Kant aurait soutenu que notre homme était sûr qu'il ne mentirait pas au lieu de dire qu'il le pourrait seulement. [...]
[...] Mais s'il faut plus que la conscience du devoir pour faire son devoir lorsqu'il peut en coûter de le faire, que faut-il de plus justement ? Du courage, de la volonté ou de l'inconséquence, de la bravade. Autant de choses que la conscience des lois morales ne peut pas nous donner, autant de choses qu'on ne peut pas non plus se donner. En effet, pour ne parler que de la volonté, elle n'est pas, comme on le pense, la faculté grâce à laquelle il nous est possible, chaque fois qu'on le veut, de vaincre nos passions. [...]
[...] En conséquence, elle ne peut donc pas être révélée que par les lois morales comme le soutient Kant. Par ailleurs, cette thèse n'est pas sans ambiguïté : Kant soutient que les lois morales nous révèlent que nous sommes libres en cela que la conscience que nous en avons pourraient nous déterminer à agir contre nos penchants, y compris contre le désir de vivre. Or, cette révélation n'est que partielle : tout ce que Kant avance, c'est qu'il serait possible de faire son devoir au péril de sa vie, mais pas qu'on fera son devoir quoiqu'il en coûte. [...]
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