"La jeune Tarentine" est l'un des rares poèmes publiés non pas certes du vivant de son auteur, mais avant la première publication de ses œuvres en 1819 par Latouche. "La jeune Tarentine" fut en effet rendu public en 1802 dans "Le Mercure" sous le titre "Élégie dans le goût de l'ancien". Cette publication "en avant-première" pour ainsi dire, alliée aux qualités du texte, expliquent probablement pourquoi ce poème-ci est aussi célèbre.
D'un point de vue formel c'est selon Becq de Fouquières et Walter une élégie, une plainte, faite de trente alexandrins à rimes suivies organisés a priori d'un seul tenant. Du point de vue du fond il convient de s'interroger sur les causes de la célébrité de ce poème et sur les procédés employés par Chénier, ce qui permettra de mettre en évidence l'intérêt profond de ce texte, à la fois en tant qu'élégie et en tant qu'œuvre de Chénier, œuvre représentative de l'originalité du poète.
[...] Le voyage de Myrto vers Camarine La première sous-partie de la deuxième partie (allant du vers 3 au vers 10) présente au lecteur l'histoire (car c'est bien une histoire que Chénier raconte dans ce poème) de la jeune Tarentine, Myrto. Dès le vers 3 la fin de l'histoire racontée est connue : Elle a vécu, Myrto, la jeune Tarentine Le passé composé rend à la fois l'action plus proche au lecteur (car c'est un temps du système présent) mais marque également la fin définitive de l'action, qui est irrémédiablement passée et terminée ; l'expression avoir vécu au passé composé signifie être mort Dès le début du vers le pourquoi de la déploration demandée aux alcyons est donc explicité : la jeune Tarentine est morte. [...]
[...] Le voyage de myrto a. L'apostrophe aux alcyons Les deux premiers vers sont une apostrophe marquée par le ô vous aux alcyons, oiseaux de mer fabuleux au chant plaintif qui chez les Grecs sont considérés comme étant un heureux présage car l'on fit qu'ils ne font leurs nids que sur une mer calme[2]. La construction de ce premier mouvement du texte est parfaitement symétrique : au Pleurez qui entame le vers 1 répond le pleurez qui conclue le vers le doux alcyons placé dans le premier vers après l'impératif se retrouve avant lui dans le deuxième vers, et enfin l'apostrophe oiseaux sacrés conclue le vers 1 et entame le vers 2. [...]
[...] Les Néréides élèvent la dépouille, et la portent dans un monument sur le rivage. Les trois verbes décrivant les actions des déesses sont placés en tête de vers, chacun avec un pronom personnel complément d'objet direct anaphorique qui met encore en valeur la jeune Tarentine, élevée et portée par des divinités. Les trois verbes sont au présent, la narration reste dans l'immédiateté. Le corps est au vers 21 déposé au cap du Zephyr[4] dans un monument monument funéraire, ou monument symbolisant la beauté le corps devenant alors la beauté personnifiée renforcée par la mort, par la fatalité qui a exercé sur lui son emprise l'adverbe mollement montrant la douceur avec laquelle son corps est déposé, preuve de l'amour que lui portent les Néréides. [...]
[...] Dans le vers 17 la déesse Thétis pleure même la mort de cette simple mortelle ; une fois encore la jeune Tarentine est plus ou moins mise au même niveau que les dieux, mais nous ne savons pas explicitement pourquoi elle a droit à un tel honneur peut-être le tragique de sa mort, belle jeune femme aimée qui meurt noyée, touche-t-il les divinités. La Néréide cache donc la dépouille au creux d'un rocher de peur que les monstres dévorants ne s'en emparent. [...]
[...] Laquelle fête à venir est encore évoquée aux vers 8 à 10 par les atours qu'auraient dus revêtir (noter le conditionnel seraient qui est le temps du futur dans le système passé) la jeune Tarentine, énuméré avec l'insistance d'un et anaphorique : sa robe d'hyménée et l'or et les parfums préparés Les trois parements qu'elle aurait dû revêtir ont été enfermé[s] dans le cèdre une synecdoque pour évoquer le cercueil où est le corps au vers 26 ; la construction des vers 7 et 8 avec rejet du participe passé enfermé semble symboliser l'emprisonnement évoqué a [ ] enfermé Il y a une allitération en [ r ] aux vers 8 à 10. La clef vigilante du vers 7 est une métaphore de la mort qui enferme dans le cercueil, et qui veille toujours. Ainsi l'évocation de la fête préparée, des beautés qui pour cette occasion auraient été déployées, sert à marquer profondément la tristesse de la mort de la jeune fille, qui, sans avoir été ouvertement exprimée, a néanmoins été fortement sous-entendue par les deux verbes au passé composé, et par le terme cèdre II. La partie élégiaque du poème a. [...]
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