Ce document est un commentaire de texte complet et entièrement rédigé qui porte sur Acte 1, scène 3 de "Mithridate" de Jean Racine. Comment le double affrontement dont il est question ici pose-t-il le pacte héroïque de cette tragédie ? Cette scène établit le triangle amoureux racinien et oriente la sympathie et l'antipathie des spectateurs pour l'ensemble de la pièce. Elle permet surtout à Racine de relier étroitement le conflit politique et la tragédie amoureuse en créant un vide autour du personnage de Mithridate, autour duquel gravite chaque élément de la pièce.
[...] Racine crée une entrée fracassante qui brise le duo qui se mettait en place. Les premières répliques de Pharnace se passent de formules d'introduction. La violence éclate par l'allitération de labiales et de vélaires des vers 226 à 226. Pharnace utilise la mort de son père comme un outil de persuasion, sans la moindre marque de douleur ni de respect. Il se sert de formules jussives, et se pose en maître. Sa demande en mariage semble davantage motivée par la nécessité et ses compliments manquent de subtilité. [...]
[...] Il n'y a aucun éloge funèbre ni aucune déploration. En revanche Xipharès s'attarde dans une prosopopée sur la nécessité de le venger. Le ressort tragique est tendu par la double trahison autour de l'image du Père/roi : l'alliance avec les Romains qui implique un oubli du passé, ce qui ne peut se concevoir dans une société aristocratique, et le fait de convoiter l'"accordée" de son père, ce qui paraît bien hardi tant que la mort du monarque n'est pas confirmée. [...]
[...] Jean Racine, Mithridate Acte I scène 3 : commentaire La présentation de Mithridate au Roi Louis XIV, quelques jours après l'admission de Racine à l'Académie française souligne le caractère politique de cette tragédie orientale qui voit le dramaturge revenir à l'inspiration antique. Tous les thèmes raciniens se rejoignent : les frères ennemis, la passion coupable, la rédemption d'un monarque, la place de la vengeance dans une pièce dynamique marquée par les péripéties et les grands sentiments. La scène 3 de l'acte I montre un affrontement entre Pharnace, le frère violent et traître et Monime, la loyale « accordée » du roi Mithridate dont on a annoncé la mort au combat, mais également entre Pharnace et son demi-frère Xipharès, tous deux amoureux de la jeune femme. [...]
[...] Racine respecte la bienséance en imaginant un mariage contrarié par la guerre. Enfin Xipharès, après un silence imposé par le respect dû à l'aîné, finit par voler au secours de la femme qu'il aime. Son discours reprend les valeurs évoquées dans celui de Monime, pour souligner ainsi l'aspect déplacé des propos tenus par Pharnace. Il se pose en homme d'action et incite son frère à combattre à ses côtés. Dans la scène il prend de l'assurance et la querelle entre les rivaux semble occulter la présence de Monime. [...]
[...] Le vieux roi donne sa bénédiction au couple Monime Xipharès et se donne la mort en toute tranquillité. Derrière la stratégie politique de Racine, apparaît ici sa propre évolution sur le repentir et le pardon. Mithridate, tragédie orientale porte toutes les tensions et les espoirs des tragédies chrétiennes. Si aujourd'hui cette pièce semble avoir perdu de son attrait; il est pourtant possible de la placer au cœur d'une évolution spirituelle de son auteur, tant sur le plan littéraire que spirituel. Mithridate propose un équilibre enfin trouvé entre La Thébaïde et Athalie. [...]
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