Eugène Ionesco (1909 - 1994) est un auteur dramatique et écrivain français d'origine roumaine. Elu à l'Académie française en 1970, il est le chef de file du théâtre de l'absurde. Parmi ses oeuvres, Rhinocéros, dont est extrait ce passage, est une farce tragique et anti-réaliste où la transformation irrationnelle des hommes en rhinocéros doit nous alerter sur les dangers d'une idéologie despotique. En quoi cet incipit contient-il tous les éléments d'une scène d'exposition ? Afin de répondre à cette question, nous allons voir dans un premier temps la plongée dans un univers banal, puis le portrait psychologique opposé des personnages, et pour finir, nous étudierons la tonalité tragique de cette scène.
I) Plongée dans un univers banal
a) description spatiale :
Le champ lexical du décor met en place les divers éléments sur scène : "une place" (l. 1), "petite ville de province" (l. 1), "maison", "épicerie" (l. 3), "clocher d'une église" (l. 10-11) "rue" (l. 12), "café" (l. 13, 14, 15) "tables et chaises" (l. 15) -> la scène se situe dans un village semblable à tous les villages de France dans les années 50.
Les indices spatiaux situent ces éléments entre eux "au fond" (l. 1), "au rez-de-chaussée" (l. 2), "au-dessus" (l. 5, 10, 13), "au premier étage" (l. 6), "dans le fond" (l. 8), "sur la gauche" (l. 9), "pas loin des ..." (l. 9), "dans le lointain" (l. 11), "entre ... et côté" (l. 11), "sur la droite" (l. 12), "en biais" (l. 13), devant (l. 14), jusque près du milieu (l. 15-16), près des (l. 16), sous un bras (l. 22), sous l'autre (l. 23), de droite à gauche (l. 24). Enfin, on sait aussi comment se placent les personnages : Bérenger doit rester "contre un mur" (l. 26) et Jean, regarder "du côté de la coulisse gauche" (l. 94) (...)
[...] Au fur et à mesure de leur échange, arrive un bruit parasite qui va crescendo et qui intrigue de plus en plus les personnages et les spectateurs/lecteurs. C'est grâce au champ lexical du bruit que le suspense s'installe le bruit très éloigné (l.68), criant (l. des bruits qu'il ne perçoit pas consciemment (l. les bruits sont devenus énormes (l. 84) et les bruits de galop tout proches, très accélérés (l. 85-86). L'accroissement sonore va de pair avec l'accélération du déplacement, la course précipitée (l. 70) devient galop (l. 85) et par voie de conséquence, le souffle (l. [...]
[...] 69) paraît être soit un éléphant soit un rhinocéros par son long barrissement (l. 70-71). Cette intuition est confirmée aux lignes 85-86 par la présence d'un animal puissant et lourd dont on découvre à la toute fin la nature exacte : c'est un rhinocéros (l. animal éponyme. Conclusion: Cette scène d'exposition nous donne tous les éléments indispensables à la compréhension intellectuelle et sensible de la pièce. Tout d'abord, nous nous situons dans le temps et dans l'espace puis nous nous familiarisons avec les protagonistes, Bérenger et Jean, le premier est passif et faible tandis que le second est réactif et volontaire. [...]
[...] Les indications techniques avant le lever du rideau (l. quelques secondes après le lever du rideau (l. lorsque le rideau se lève (l. 22) mentionnent une mise en place très précise. Le dialogue des deux protagonistes nous renseigne sur leur vie quotidienne : tous les jours 45-46), huit heures trois semaines seulement de vacances (l. 40-41), vingt et un jours de congés (l. Bérenger et Jean ont une durée de travail hebdomadaire identique à la population troisième semaine de congés payés en France en 1956). [...]
[...] En quoi cet incipit contient-il tous les éléments d'une scène d'exposition ? Afin de répondre à cette question, nous allons voir dans un premier temps la plongée dans un univers banal, puis le portrait psychologique opposé des personnages, et pour finir, nous étudierons la tonalité tragique de cette scène. Plongée dans un univers banal description spatiale : Le champ lexical du décor met en place les divers éléments sur scène: une place (l. petite ville de province (l. maison épicerie (l. [...]
[...] 61) démontre que parfois, il ne voit pas ce que veut dire son ami. La répétition du mot volonté 50) marque que ce trait de caractère est celui qui distingue le plus Jean de Bérenger. Jean répète trois fois l'expression moi aussi 46) pour insister sur sa conformité avec tout le monde répété deux fois 15) et son exemplarité par rapport à Bérenger qu'il juge négligeant. En répétant l'adverbe d'opposition pourtant (ligne il souligne son mérite d'être présent malgré son dur labeur. [...]
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