En 1959, Ionesco publie Rhinocéros, une pièce en trois actes et quatre tableaux représentative du Théâtre de l'Absurde. L'œuvre met en scène une épidémie étrange : les habitants d'une tranquille petite ville de province se métamorphosent en rhinocéros.
Le début de l'acte III crée un parallèle avec le deuxième tableau de l'acte II : Bérenger, qui craint d'être atteint de la rhinocérite, reçoit dans sa chambre son collègue de bureau Dudard. Mais celui-ci se transforme en rhinocéros ; puis, à son tour, Daisy quitte Bérenger. Ainsi, les personnages qui symbolisent l'intelligence et l'amour capitulent face à la rhinocérite. Dans le dénouement, le protagoniste se trouve donc seul en scène et prononce un long monologue où s'expriment ses tourments.
[...] Les deux mots récurrents seul et personne soulignent que Bérenger est le dernier être humain. De plus, toute communication est impossible: ce passage de l'œuvre radicalise la faillite de la parole présente dans toute la pièce. Toute communication est impossible, plus personne ne parlant son langage: D'abord, pour les convaincre, il faut leur parler. Pour leur parler, il faut que j'apprenne leur langage. Où qu'ils apprennent la mienne ? Mais quelle langue est-ce que je parle ? Quelle est ma langue ? Est-ce du français ça ? [...]
[...] Ionesco, Rhinocéros, acte III: le monologue final En 1959, Ionesco publie Rhinocéros, une pièce en trios actes et quatre tableaux représentatifs du Théâtre de l'Absurde. L'œuvre met en scène une épidémie étrange: les habitants d'une tranquille petite ville de province se métamorphosent en rhinocéros. Le début de l'acte III crée un parallèle avec le deuxième tableau de l'acte II : Bérenger, qui craint d'être atteint de la rhinocérite, reçoit dans sa chambre son collègue de bureau Dudard. Mais celui-ci se transforme en rhinocéros; puis, à son tour, Daisy quitte Bérenger. [...]
[...] La scène prend ici la dimension d'une farce tragique. L'échec Constat d'impuissance: abondance des phrases négatives Je n'ai pas de cornes l 69, Mais ça ne pousse pas! l 73, Non, ça n'est pas ça! l 84, non, non, ce n'est pas ça l 85-86, Je n'arrive pas à barrir l 87, Les hurlements ne sont pas des barrissements! l 88-89); adverbes seulement répétition de jamais Trop tard maintenant plus 93) définie le caractère définitif de l'impossibilité; opposition entre le souhait et la réalité: antithèse Je voudrais bien, je voudrais tellement, mais je ne peux pas 93-94) souligne que Bérenger ne parvient pas à abdiquer son humanité et a faire triompher sa part de monstruosité. [...]
[...] enfin, il se sent coupable d'être un homme J'ai eu tord! l 68, Comme j'ai mauvaise conscience l 89 et Je ne peux plus me voir. J'ai trop honte! l 94- 95). La douleur de Bérenger est traduite par les phrases exclamatives, les interjections hélas l 69 et anaphore l 91, Oh! l 68, Ah l les répétitions Je ne suis pas beau, je ne suis pas beau l 65-66, jamais je ne deviendrai rhinocéros, jamais, jamais! l 92) qui au final prouvent sa déploration et son désespoir. [...]
[...] Mais dans cette impuissance réside son humanité, celle d'un individu ordinaire auquel le lecteur peut s'identifier. Le texte ne constitue pas un véritable dénouement dans la mesure où il n'offre pas de véritable conclusion: le rideau tombe sur une action en cours. La force de ce monologue final tient à son ambiguïté. Faut-il lire dans la résistance de Bérenger un espoir pour l'homme face aux tentations totalitaires ? Ou bien faut-il voir dans l'absurdité de la situation de Bérenger un constat profondément pessimiste sur la condition humaine ? [...]
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