Lactance (Lucius Caecilius Firmianus) est un Père de l'Église du IIIe siècle, contemporain de l'empereur Constantin qui le prit comme professeur de littérature latine pour son fils. Converti autour de 300, il abandonne les écrits profanes et païens pour se tourner vers la théologie. Les Institutions divines sont achevées peu avant l'Édit de Milan : Lactance tâche d'y concilier dans un dessein apologétique philosophie et dogmes chrétiens, et tente de démontrer aux païens que c'est la raison même qui invite à accepter la doctrine chrétienne.
Le livre VII et dernier des Institutions s'intitule « De vita beata » : la béatitude éternelle est la « récompense que Dieu propose à ceux qui renoncent aux douceurs des biens de la terre, pour suivre la vertu avec toutes ses amertumes. » Le jugement dernier se faisant à la fin du monde, Lactance passe en revue les conceptions philosophiques païennes du monde, qu'il disqualifie à l'exception de l'épicurisme, seul à avoir vu que le monde a eu un commencement et aura une fin. Lactance s'interrompt alors pour lancer une charge violente contre ceux qui s'attachent aux plaisirs terrestres et qui ne pourront rien comprendre à la doctrine.
[...] Traduction et commentaire de Lactance, institutions divines, VII: de la vie bienheureuse 3. Lecture préalable : 2. Je commencerai par la création du monde, et je dirai en quel temps et pour quelles raisons Dieu s'y est occupé. Platon a parlé de la structure de ce merveilleux ouvrage. Mais comme il ne savait rien des mystères que l'on n'apprend que de Dieu et des prophètes, il a dit qu'il avait toujours été ; ce qui n'est pas véritable. Tous les corps pesants et solides ont eu un commencement et auront une fin. [...]
[...] - Fort de cette assurance, Lactance procède à une classification très claire, pour l'essentiel concernant les pravae vitiosaeque mentes Le passage manifeste alors une rhétorique très forte faite de parallélismes et de répétitions des charnières ou structures : rythmes binaires et dédoublés, à travers par exemple aut aut protase / apodose aut etiam si intelligent, dissimulabunt tamen avec adverbes placés en miroir, strict parallélisme des relatives quorum suavitate / cujus acerbitate travaillé jusque dans le cas du génitif du pronom, et les sonorités, le cas ablatif et la longueur identique des deux substantifs (l.2-5) ; à trois reprises, répétition de la relative sujet Qui / causale introduite par quia : l.5-6, 9-12 (sans le quia ; Item et vero servent de coordinateurs d'addition. le dernier, Qui autem sani permet de refermer la liste en revenant à l'opposition avec les pravae mentes Qui est apte à entendre la doctrine chrétienne ? - La première phrase (l.1-5) présente de manière générale les pravae vitiosaeque mentes qui ne comprendront rien à la doctrine, ou feindront de ne pas comprendre. Ces esprits malades sont ceux des hommes attachés aux plaisirs terrestres, que Lactance ne précise qu'ensuite. [...]
[...] Nam qui avaritia et opum inexplebili quadam siti flagrant, quia non possunt, venditis aut dilargitis quae amant, tenui cultu vitam degere, sine dubio malunt id esse fictum, quo desideriis suis renuntiare coguntur. Item, qui libidinum stimulis incitati, ut ait poeta, in furias ignemque ruunt[1], utique incredibilia nos afferre dicunt, quia vulnerant aures eorum praecepta continentiae, quae illos a voluptatibus suis prohibent, quibus animam suam cum corpore adjudicaverunt. Qui vero ambitione inflati, aut amore potentiae inflammati, omne studium suum ad honores acquirendos contulerunt, ne si solem quidem ipsum gestemus in manibus, fidem commodabunt ei doctrinae : illos jubet omni potentia et honore contempto humiles vivere, atque ita humiles, ut et accipere injuriam possint, et referre nolint, si acceperint. [...]
[...] Le thème de la création du monde annoncé en 2 disparaît et ne revient qu'en 4. Le 3 a d'ailleurs sa propre unité, s'ouvrant sur haec nostra quae tradimus et se refermant sur quaecumque dicimus avec l'opposition entre les pravae vitiosaeque mentes au début (l.1) et les sani (l.13), à la fin. - Lactance fait preuve d'une grande assurance, devenant péremptoire en plusieurs occasions. L'énonciation le montre : une seule marque de la 1ère personne du singulier, le verbe puto mais tempéré par l'adjectif necessarium ; la 1ère du pluriel est plus importante (l.1 nostra tradimus ; l.8 nos ; l.14 dicimus Lactance se donnant la force de la communauté des Chrétiens ; mais surtout dans sa grande majorité le texte est une suite d'affirmations assénées d'un point de vue supérieur et impersonnel : la 3ème personne (ceux qui , ceux qui ) est presque systématique. [...]
[...] Lactance s'interrompt alors pour lancer une charge violente contre ceux qui s'attachent aux plaisirs terrestres et qui ne pourront rien comprendre à la doctrine. Pourquoi cette interruption, à ce moment, et une critique si vive ? Nous montrerons d'abord que ce passage constitue une parenthèse, laquelle veut distinguer très clairement quels lecteurs sont aptes ou non à entendre l'exposé de la doctrine chrétienne. Cette parenthèse est ensuite l'occasion d'une charge violente contre les plaisirs terrestres et les hommes qui s'y attachent. Lactance tente ici de qualifier la doctrine chrétienne comme seul discours philosophique valable. [...]
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