L‘Ingénu, conte de Voltaire paru en 1767, met en scène un Huron débarquant sur le sol français et découvrant à travers quelques individus, dont un prieur et sa sœur qui se révèlent de sa famille, les mœurs de la société française du XVIIe siècle. Ayant été élevé dans un peuple éloigné, il ignore tout des codes de ce monde auquel il décide de s'assimiler en restant auprès de ses nouveaux parents, et cela occasionne de nombreuses réflexions sur ce qu'il est convenu de faire ou non. Jean Varloot écrit : « Dans L'Ingénu, le héros est à la fois en opposition et en accord avec la société, à la fois passif et positif ». La question de l'opposition entre nature et culture, entre nature et société, traverse les réflexions de Voltaire, et celles de la sphère intellectuelle française du XVIIIe, le plus opposé à Voltaire étant Rousseau et son « bon sauvage ». En racontant l'insertion dans la société française d'un être qui lui est étranger, Voltaire construit un dispositif proche de celui de Montesquieu dans Les Lettres persanes, celui de l'étranger au regard révélateur, par la mesure de l'écart entre ce qu'il connaît et ce qu'il observe.
Comment le héros, dépourvu d'éducation et au caractère violent, voit-il ces caractéristiques compensées par son ingénuité, qui lui confère le pouvoir d'exprimer son jugement, dans un compromis entre tentative de s'accorder au monde et nécessité de pointer les incohérences ?
[...] Comment le Huron, dépourvu d'éducation et au caractère violent, parvient-il à exprimer son jugement dans L'Ingénu de Voltaire ? L‘Ingénu, conte de Voltaire paru en 1767, met en scène un Huron débarquant sur le sol français et découvrant à travers quelques individus, dont un prieur et sa sœur qui se révèlent de sa famille, les mœurs de la société française du XVIIe siècle. Ayant été élevé dans un peuple éloigné, il ignore tout des codes de ce monde auquel il décide de s'assimiler en restant auprès de ses nouveaux parents, et cela occasionne de nombreuses réflexions sur ce qu'il est convenu de faire ou non. [...]
[...] Il apprend également à canaliser sa violence, et comprend ce que ses actions antérieures ont eu d'inconvenant : je compte bien jouir d'une félicité sans mélange avec la belle et généreuse Saint-Yves : car je me flatte, ajouta-t-il en s'adressant à son frère avec le sourire de l'amitié, que vous ne me refuserez pas, comme l'année passée, et que je m'y prendrai d'une manière plus décente (pp135-136). En formulant sa compréhension, il agit sur la vision qu'ont de lui les gens qui l'entourent, fait connaître ses nouvelles dispositions d'esprit, et dispense des excuses. L'évolution est visible, et l'insertion dans les codes sociaux presque totale. [...]
[...] Cet apprentissage est actif, car il ne se contente pas de recevoir les pensées émises par d'autres, mais il les critique : il devient actif en exerçant ses capacités naturelles, par rapport auxquelles il est passif, sur des domaines intellectuels qu'il s'approprie. Il en vient également à poser par écrit ses idées au chapitre onze, entérinant ainsi par l'écriture la participation active qu'il prend à l'appréhension du monde. En apprenant de la sorte, l'Ingénu s'accorde avec les règles, avant de dénoncer de l'intérieur, d'entrer en opposition. Le passage par l'acceptation et par la formation volontaire de l'esprit est la voie d'accès à un développement de ses capacités d'analyse et de compréhension du monde. [...]
[...] Par amour, elle va à Versailles, et fait des choix qui reposent sur un jugement très personnel de la conduite à tenir en fonction exclusivement de son échelle de valeurs. Il est plus important pour elle de délivrer son amant que de préserver sa vertu, bien qu'elle sache déjà qu'elle ne résistera pas au sacrifice de sa vertu, la récurrence des idées de suicide face au dilemme en atteste. Elle choisit le renoncement, sur la base de jugements qui ne sont pas issus des préjugés et dogmes dictés par la société. [...]
[...] Cette opposition est, elle aussi, le fruit d'un état et non d'une réflexion. C'est dans la passivité, dans son état d'Ingénu, que l'opposition existe, et non avec véhémence ou objectif de s'opposer. Son attitude et la sympathie qu'il inspire entraînent une modification des gens à son contact. Gordon s'interroge sur les choses auxquelles il croit, sur les méthodes de sa pensée également. Ainsi, lorsque l'Ingénu, à sa demande, lui fait part de ses idées sur la façon dont nous recevons nos idées Gordon est mis dans l'embarras par la force du raisonnement de son interlocuteur, mais, s'il tente tout de même de défendre ses positions, il constate avant tout ses limites : Cette naïveté embarrassait fort le bonhomme ; il sentait qu'il faisait de vains efforts pour se tirer de ce bourbier ; et il entassait tant de paroles qui paraissaient avoir du sens et qui n'en avaient point ( ) (p108). [...]
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