Le premier poème des Châtiments s'intitule Nox (c'est-à-dire "La nuit"). Le dernier se nomme Lux (c'est-à-dire "La lumière"). Ce passage symbolique de l'ombre à la lumière est rythmé par plusieurs textes du recueil. C'est le cas de Stella, qui décrit l'apparition de l'étoile du matin.
Les premiers vers présentent le poète qui s'éveille et voit luire l'étoile que toute la nature, encore plongée dans l'ombre, semble contempler. Puis, il croit surprendre les sentiments et les paroles des animaux et des plantes. Commence alors un long passage au style direct qu'on peut appeler prosopopée de l'étoile (Une prosopopée est un discours qu'un auteur place dans la bouche d'un être qui, dans la réalité, ne parle pas. Les paroles que Hugo prête à l'étoile forment une prosopopée) qui invite l'humanité à l'espoir et lui promet le triomphe de la Liberté.
Le poème montre la nature sous un jour vivant et mystérieux, qui est propre au romantisme. Il délivre en outre un message d'espérance qui se fonde sur une vision inspirée de l'avenir.
1. UNE VISION ROMANTIQUE DE LA NATURE
Hugo témoigne ici d'une conception romantique de la nature. Le monde entier est parcouru de sentiments mystérieux. Les choses et les êtres communiquent entre eux. Ils établissent même un étrange dialogue avec l'homme et lui révèlent une vérité sacrée.
a) La communion des êtres et l'animisme (tous les éléments de la nature possèdent une âme)
La nature ici est envisagée comme un tout au sein duquel communient les êtres, les plantes et les choses.
- Chaque être semble animé d'une vie propre. Les végétaux sont doués d'une sensibilité inquiète ("l'herbe [...] frissonnait éperdue"). Les animaux communiquent entre eux comme des hommes ("Les oiseaux se parlaient dans des nids") (...)
[...] Mais Hugo insiste, de manière originale, sur le fait que la nature est à la fois sacrée et intimement liée à l'univers de la poésie. - L'aspect sacré de la nature se révèle dans le discours de l'étoile, riche de références bibliques. L'astre proclame en effet : J'ai lui sur le Sina et J'ai brillé sur Moïse Dans La Bible, c'est sur le mont Sinaï que Dieu dicte à Moïse les dix commandements. Autre allusion biblique : Je suis le caillou d'or et de feu que Dieu jette, Comme avec une fronde, au front noir de la nuit. [...]
[...] Le poète exprime sa confiance en l'avenir avec optimisme. La vision de l'humanité - L'étoile s'adresse progressivement à l'ensemble de l'humanité. Les termes placés en apostrophe se succèdent selon un ordre révélateur. L'astre parle d'abord au sens politique et moral de l'homme. Il se sert de termes généraux Ô nations ! ou abstraits vertu, courage, foi Il se tourne ensuite de manière plus individuelle vers ceux dont le cœur est en éveil Penseurs, esprits Ces hommes, les poètes, jouent le rôle de sentinelles Les derniers termes en apostrophe Paupières prunelles Terre vie recouvrent tout ce qui habite la terre. [...]
[...] Celui-ci, dans Les Châtiments, est parfois identifié à Lazare, l'homme que Jésus ressuscita d'entre les morts. Je suis celle qu'on croit dans la tombe et qui sort Je suis ce qui renaît), Debout, vous qui dormez Enfin, l'image du lion océan évoque doublement le peuple. L'allusion finale à ange Liberté est donc préparée par une succession de notations historiques et symboliques. La lumière que promet l'étoile se conquiert par la lutte politique. - Mais le terme de lumière peut aussi être entendu en un sens abstrait. [...]
[...] Politique et idéal - II n'est question ici ni de Napoléon III ni du Second Empire : le message de l'étoile est d'une tout autre portée. Il est universel et intemporel. Il s'adresse d'ailleurs aux nations plutôt qu'à la France. Il comporte toutefois de nombreuses allusions, tantôt historiques tantôt symboliques, à la résistance politique. Le Taygète n'est pas seulement le mont des Muses. C'est aussi, selon une légende grecque, le lieu où le dieu grec Apollon inspira à Lycurgue les lois démocratiques de Sparte. Le Taygète symbolise donc la lutte contre la tyrannie. [...]
[...] Cette lumière est aussi celle de Dieu (portée par un ange et un géant Elle est en même temps celle de l'avenir J'arrive L'évocation de l'aube scelle la réunion de la matière et de l'esprit. Dans ce passage, Hugo donne libre cours à un génie poétique visionnaire. Il perçoit dans la nature la connivence et la lutte de forces secrètes. Il promet aux hommes un avenir rayonnant. L'énergie de la nature réconcilie divinités païennes et figures bibliques, politique et poésie, lumière et liberté. Hugo nous invite à contempler une aube qui réunit, sous le signe du Progrès, l'histoire de l'homme et son avenir. [...]
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