S'adressant à Doña Sol, Don Ruy Gomez dresse un réquisitoire ferme, voire virulent, à l'encontre des jeunes hommes (qu'il oppose aux "vieux", vers 8) : "ces cavaliers frivoles" (vers 2), "ces jouvenceaux" (vers 4), "ces jeunes oiseaux" (vers 5). Les termes sont péjoratifs et appartiennent au lexique de la dégradation. Usant d'un schéma habituel de la comédie classique, le vieil homme souhaite ainsi ridiculiser les jeunes hommes, alors que, par effet comique, c'est lui qui se rend ainsi ridicule (...)
[...] T E X T E Acte III Scène 1 DOÑA SOL, blanche, et debout près d'une table ; DON RUY GOMEZ DE SILVA, assis dans son grand fauteuil ducal en bois de chêne. [ ] DOÑA SOL Qui sait ? DON RUY GOMEZ Mais va, crois-moi, ces cavaliers frivoles N'ont pas d'amour si grand qu'il ne s'use en paroles. Qu'une fille aime et croie un de ces jouvenceaux Elle en meurt, il en rit. Tous ces jeunes oiseaux, À l'aile vive et peinte, au langoureux ramage, Ont un amour qui mue ainsi que leur plumage. [...]
[...] Mais, c'est à travers le système rimique que l'alexandrin sert la parole de Don Ruy. De fait, les trois groupes nominaux désignant les jeunes hommes sont placés à la rime, tandis que les deux rimes masculines (jouvenceaux, vers 4 et oiseaux, vers désignent directement les jeunes hommes et les rimes féminines (frivoles, vers 2 ; paroles, vers 3 ; ramage, vers 6 ; plumage, vers se rapportent aux attributs de la jeunesse. L'organisation du discours vise ainsi à discréditer aux yeux d'une fille (vers tout l'attrait que pourraient avoir ces jouvenceaux. [...]
[...] [ ] Victor Hugo, Hernani, Acte III scène 1 (extrait) ÉTUDE ANALYTIQUE Introduction Victor Hugo (1802-1885) est considéré comme le plus important des écrivains romantiques de la langue française, ayant contribué, tout comme Baudelaire, au renouvellement de la poésie et de la littérature. Grande figure littéraire, chef de file et théoricien du romantisme et politicien charismatique, il est aussi celui qui a revendiqué une conception radicalement nouvelle du théâtre : au dépouillement prôné par les classiques, le dramaturge oppose un spectacle foisonnant par ses décors, ses lumières et ses costumes. [...]
[...] Sous forme de sentence, par cet hémistiche lapidaire où l'asyndète sert la structure chiasmatique de l'énoncé (elle s'oppose à il, meurt s'oppose à rit), le duc résume le caractère cynique des jeunes hommes. Par cet excès de réprobations contre les jeunes hommes, Don Ruy pousse au ridicule et le spectateur ne peut effectivement que sourire devant tant de véhémence, même s'il sait que Hernani est condamné à mourir sur le corps de Doña Sol. - mais ridicule La métaphore filée de l'oiseau est à double sens. [...]
[...] Les termes sont péjoratifs et appartiennent au lexique de la dégradation. Usant d'un schéma habituel de la comédie classique, le vieil homme souhaite ainsi ridiculiser les jeunes hommes, alors que, par effet comique, c'est lui qui se rend ainsi ridicule. Les tournures condescendantes (Mais va, crois-moi, vers et l'amour paternel, amical (vers 16) de Don Ruy Gomez contribuent à ce ridicule. Participant à une logique du mépris, le démonstratif récurrent ces (vers et qui qualifie les jeunes hommes, appuie cette volonté de mettre à distance cette jeunesse. [...]
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