Le titre du poème, Amours, au pluriel, fait référence aux amours réelles ou imaginaires de Michaux, et non pas au sentiment amoureux. On trouve donc quelque peu paradoxal le tutoiement de Michaux. Ainsi à qui s'adresse-t-il ? Au sentiment amoureux ? A une de ses amours ?
Tout d'abord ce "tu" est tout lecteur, lecteur qui se voit alors soumis a des reproches et qui est happée dans le poème, à une place de protagoniste (...)
[...] Au sentiment amoureux ? A une de ses amours ? Tout d'abord ce tu est tout lecteur, lecteur qui se voit alors soumis a des reproches et qui est happée dans le poème, à une place de protagoniste. Il me semble que Michaux use du tutoiement dans un sorte de confusion de tout cela, de ses amours et peut être du sentiment amoureux. Le tutoiement permet une proximité avec l'objet concerné que le vouvoiement, bien qu'il aurait été de pluriel et non de respect, aurait supprimé. [...]
[...] Mot contenant par ailleurs bonne : expression d'une sensation agréable. Il pose ensuite des terminaisons convenues au prénom imaginaire, mélangeant le nom propre et le nom commun. Ainsi banjelette nous évoque un petit banjo fragile, et banjeby un personnalisation de chérie. Jusqu'à ce que la tension retombe, la raison reprend sa place d'intermédiaire entre le sentiment et le langage : le poète nous traduit les mots de bibolabange ou de bilabonne par si aimante, Banjo, si douce Ce retour sur terre suivant l'enthousiasme est dû au rappel de la fatalité, le poète a perdu sa bien aimée. [...]
[...] Effectivement Michaux semble évoquer à multiple reprise la séparation : ce toi -devenue personne sous son écriture- est inaccessible. D'ailleurs ce poème est une faillite : il ne lira pas ce livre Le poème a donc une connotation désespérée, comme si tous les autres recours avaient échoués et que le poète tentait celui ci tout en sachant qu'il n'a aucune chance de succès. Michaux ne parvient pas à atteindre : c'est à dire qu'il ne parvient pas à communiquer avec lui, mais aussi qu'il n'arrive pas à le toucher, à le rendre sensible à sa cause. [...]
[...] Le terme de lettre instaure une nouvelle confusion : est-ce les lettres qui forment les mots, ou des lettres envoyées ? Puis de même qu'un enfant qui s'invente des amis imaginaires, il personnifie le billet d'avion : il passe de un billet , indéterminé, à ce billet , le démonstratif montre que l'objet est unique, puis finalement : demain, billet et moi nous nous en allons Le billet a perdu tout article, comme s'il s'agissait alors d'un nom propre. D'ailleurs le poète a respecté la formule de politesse qui consiste à mettre moi en dernier d'une série de personne. [...]
[...] Michaux recherche la douceur familière des consonances du prénom de celle qu'il aime, tout en exprimant ce qu'il ressent, sans se limiter au simple prénom de sa bien aimée. Ainsi crée-t-il bibolabange Il faut noter l'allitération en b , première lettre de banjo, mot dont toutes les sonorités sont présentes dans bibolabange. Un l pour plus de douceur, le j adoucit en g Finalement, la fin du mot se suffit à lui même : la bange aussi Michaux fait des recherches, s'amuse dans des consonances agréables, prend du plaisir à les répéter et les tourner dans tous les sens sans s'en lasser. [...]
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