Explication linéaire des Conseils de Vautrin à Rastignac dans Le Père Goriot de Balzac, partie intitulée, "Le carrefour de la vie".
[...] Jugez des efforts que vous avez à faire et de l'acharnement du combat. Il faut vous manger les uns les autres comme des araignées dans un pot, attendu qu'il n'y a pas cinquante mille bonnes places. Savez-vous comment on fait son chemin ici ? Par l'éclat du génie ou par l'adresse de la corruption. Il faut entrer dans cette masse d'hommes comme un boulet de canon, ou s'y glisser comme une peste. L'honnêteté ne sert à rien. [...]
[...] Le langage de Vautrin est direct, sans fioriture. Verdeur du bagnard et du hors-la-loi, mais aussi intelligence d'un être d'exception qui a longuement analysé les mécanismes de la société. Il entre d'emblée dans le vif du sujet : voilà le carrefour de la vie, jeune homme, choisissez C'est la métaphore classique qui assimile la vie à un chemin. Vautrin révèle ainsi les hésitations de Rastignac. Mais il traduit l'impératif choisissez qui laisse un doute, en un passé composé qui le lève aussitôt : vous avez déjà choisi Il rappelle en deux phrases articulées autour de vous êtes allé et de flaire les efforts répétés et opiniâtres de Rastignac parti à la conquête du grand monde. [...]
[...] Voilà le carrefour de la vie, jeune homme, choisissez. Vous avez déjà choisi : vous êtes allé chez notre cousine de Beauséant, et vous y avez flairé le luxe. Vous êtes allé chez madame de Restaud, la fille du père Goriot, et vous y avez flairé la Parisienne. Ce jour-là vous êtes revenu avec un mot écrit sur votre front, et que j'ai bien su lire : Parvenir! Parvenir à tout prix. Bravo ! Ai-je dit, voilà un gaillard qui me va. [...]
[...] Il dévore crûment les ambitions du jeune homme ( jusqu'à voila un gaillard qui me va Puis, il devine les besoins d'argent et tourne en dérision la solution qui consiste à en gagner par un travail honnête ( jusqu'à de la force d'un Poiret Il se confronte ensuite brutalement à tous les arrivistes qui veulent comme lui une fortune rapide ( jusqu'à mille bonnes places Il lui propose enfin sa méthode. Dans la position du tentateur, Vautrin tente de manipuler un esprit encore jeune et fragile, qui hésite sur les moyens à employer pour réussir dans la société. I Lé dévoilement des ambitions d'un arriviste. [...]
[...] La radiographie des mobiles de l'ambitieux aboutit à un diagnostic sans appel : Ce jour là[ . ] parvenir à tout prix Fin connaisseur des hommes, Vautrin a aussitôt déchiffré chez Rastignac la rage de réussir. L'emploi du verbe parvenir sans complément, sa répétition, l'usage de l'italique et du point d'exclamation manifestent le caractère obsessionnel de l'ambition. La précision à tout prix annonce une détermination farouche et dénouée de scrupules. Cette énergie, prête à tout pour arriver à ses fins, choque la morale commune, soucieuse de ne pas nuire à la liberté d'autrui, mais elle provoque, sur un ton goguenard et familier les applaudissements virils du bagnard : Bravo ! [...]
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