Il s'agit ici d'une approche détaillée de la séquence "Sur le mur du château", "La Nuit", "Dans la cathédrale" afin de voir comment se construit la logique de fragment et de continuité. La scène de la cathédrale est un "éclat", un "fragment", qui prend néanmoins sa cohérence dans une logique d'ensemble.
Ces trois scènes constituent la fin de ce que l'on peut appeler, au coeur du premier Faust, "le drame de Marguerite", juste avant la grande séquence consacrée à la nuit de Walpurgis et la scène ultime de la prison (...)
[...] Trois scènes juxtaposées Les relations entre les différentes scènes ne sont pas explicites, ni du point de vue logique, ni du point de vue chronologique. Elles semblent isolées comme autant de tableaux indépendants, à la façon de différentes stations d'un vaste chemin de croix : la première scène relève justement de l'arrêt devant une image de la Mère des douleurs, évoquant la souffrance de la Vierge Marie au moment de la crucifixion du Christ. -Aucun élément temporel ne permet d'affirmer avec certitude le temps qui sépare ces trois scènes. Quelques heures ? quelques jours ? quelques mois ? 2. [...]
[...] Plus étonnant encore le retrait de Faust de la scène centrale. Après la brève conversation avec Méphistophélès, d'ordre très prosaïque 2 puisqu'il est question par anticipation des plaisirs de Walpurgis et de bijoux à offrir, il est dépossédé de tout rôle dramatique. C'est Méphistophélès qui chante la sérénade aux fenêtres de Marguerite ; Méphistophélès qui l'incite à s'engager dans le duel avec Valentin ; Méphistophélès encore qui pousse Faust devenu simple marionnette pour le coup fatal qui met l'adversaire à terre. [...]
[...] Dans la cathédrale est une scène statique cultivant trois discours parallèles : les assauts du mauvais esprits, la plainte de Marguerite et les paroles du chœur chanté Le goût du non-dit et de l'ambiguïté La compréhension de chacune de ces scènes est rendu ambigu par un certain nombre d'éléments qui font défaut à l'élaboration d'une interprétation univoque. Qu'est-ce qui explique, dans la première scène, les souffrances violentes de Marguerite ? S'agit-il de sa culpabilité par rapport à sa liaison avec Faust ? S'agit-il du comportement de Faust à son égard ? Connaît-elle elle-même la source de cette détresse ? [...]
[...] La thématique de la mort culmine dans la scène de la cathédrale, puisque le cadre est celui d'un enterrement, que le chœur chante le jour terrible de la colère divine (Dies irae) lors du jugement dernier au moment de la résurrection des morts, que Marguerite se sent responsable de la mort de sa propre mère évoquée dès la première tirade du mauvais esprit. On peut enfin lire dans l'évanouissement de Marguerite une mort symbolique. III/centrée autour du personnage de Marguerite 1. L'effacement de Faust Frappante est la quasi absence verbale de Faust à travers ces trois scènes. [...]
[...] C'est au lecteur d'assurer donc la continuité dramaturgique de ces scènes, apparentées à une sorte d'opéra rêvé. En témoigne la présence de la musique : chanson de Méphistophélès, chœur de la cathédrale qui selon toute évidente doit chanter non entre mais pendant les différentes répliques de Marguerite et du mauvais esprit ; et encore ce personnage collectif du peuple qui intervient dans la scène centrale, et qui fait davantage penser à un chœur d'opéra qu'à un personnage théâtral. L'enchaînement de ces trois scènes est donc très emblématique de la nouvelle façon dont se conçoit une nouvelle écriture théâtrale au début du XIXe siècle, en pleine émancipation par rapport aux dramaturgies traditionnelles. [...]
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