En écrivant Gargantua, Rabelais reprend la tradition folklorique des géants que l'on trouve, par exemple, dans Les grandes et inestimables chroniques du grand et énorme géant Gargantua, antérieures à Pantagruel, où elles sont mentionnées. Rabelais réinvente le personnage en conservant un certain nombre de ses traits. Quelles sont les fonctions de cette appropriation du personnage, fils de roi ? Son anormalité relative permet-elle de délivrer une pensée sur le prince ? S'il est en partie conforme aux attentes du lecteur, en quoi est-il typiquement rabelaisien ?
[...] 7) : Duns Scot (franciscain du 13e s.) est pour lui le symbole de l'obscurantisme du Moyen Âge, de la scolastique. Enfin, Gargantua donne la bonne interprétation de l'« Énigme en prophétie » (chap. 58). Il y est bien question des persécutions des Évangéliques : « Ce n'est de maintenant que les gens qui ont foi en la parole de l'Évangile {réduits à la créance évangélique} sont persécutés ». Rabelais fait référence aux persécutions de l'hiver 1533-1534, après le discours prononcé par l'humaniste Nicolas Cop au couvent des Mathurins, en novembre. [...]
[...] B - Gargantua un vainqueur exceptionnel de picrochole-charles quint La devise de Charles Quint « plus outre » est illustrée par la volonté de conquête que flattent ses conseillers : « Vous passerez par le détroit de Gibraltar, et là érigerez deux colonnes plus magnifiques que celles d'Hercule » (chap. 33). La devise de Charles Quint était justement ornée des deux colonnes d'Hercule. François Ier avait été défait par Charles Quint : une revanche. On a pu voir en Gargantua, le bon Prince, un double de François Ier. « La harangue {contention} que fit Gargantua aux {ès} vaincus » (chap. 50) fait allusion aux conditions de vie que Charles Quint réserva à son royal captif français. [...]
[...] Gargantua est un bon prince. Pendant la guerre, il se montre généreux envers les vaincus, comme Jules César dans l'Antiquité. Il fait la guerre parce qu'il est obligé, à l'inverse du belliqueux Picrochole (figure du tyran). En cela le roman se fait l'écho d'Érasme, auteur de l'Éducation du prince chrétien (1516) : « Un bon prince n'accepte jamais aucune guerre, excepté quand, après avoir tout tenté, il ne peut l'éviter par aucun moyen. [ . ] L'homme est né pour la paix [?] » Comme son père Grandgousier, il renvoie l'ennemi « chargé de dons, chargé de grâces, chargé de toutes offices d'amitié. » (chapitre 50). [...]
[...] A - Des vêtements immenses Comme dans les Chroniques gargantuines, le costume du géant enfant est décrit : le narrateur insiste sur les nombres considérables de tissus employés : « Pour sa chemise furent levées neuf cens aunes de toile de Châtellerault » (chap. 8) ; « Pour la braguette furent levées seize aunes un quart de ce même drap. » (chap. 8). B - Un appétit phénoménal Dès sa naissance, Gargantua manifeste un appétit hors-norme pour des humains : « Et lui furent ordonnées dix et sept mille neuf cent treize vaches de Pontille et de Bréhémond » (chap. 7). Le lait sera ensuite remplacé par le vin, qu'il apprécie très jeune. [...]
[...] Quand il se peigne, il fait tomber de ses cheveux des boulets de canon, au chapitre 37 :« [?] s'arrangeant la tête avec son peigne (qui était grand de 100 cannes, appointé de grandes dents d'éléphants toutes entières), faisait tomber à chaque coup plus de 7 ballots de boulets qui lui étaient demeurés entre ses cheveux à la démolition du bois de Vède. » Mais c'est un géant exceptionnel par son intelligence, comme l'indique l'épisode du torche-cul : l'oison après une liste de différents moyens de se torcher, est à la mesure d'un géant. Gargantua n'est pas un géant comme les autres, il est un bien un personnage de Rabelais, il est donc exceptionnel. III - Gargantua hors-normes car rabelaisien Rabelais détourne le folklore à son profit. A - Une naissance extraordinaire Après une gestation exceptionnelle de onze mois (attestée cependant par Pline), sa naissance, appelée de façon significative « nativité » (chap. 6), a pour fonction de se moquer du dogme de l'Immaculée Conception. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture