Gargantua, Rabelais, satire, scatologie, burlesque, psychologie sociale, religion, comique, torche-cul
Gargantua découvre le monde de façon ludique : il procède à une « longue et curieuse expérience », révélant son intelligence à son père, qui est prêt à lui décerner le titre de « docteur en gaie science ». Dans le chapitre précédent (12), celui des chevaux factices, le jeune prince a déjà montré son inventivité et son astuce. Depuis le début du chapitre 13, de façon insolite, il dit utiliser des objets, des animaux, des plantes pour se torcher. Au total, il y en aura cinquante-huit. Après une parenthèse où il a montré son talent de poète scatologique, il revient au procédé de la liste, faisant alterner dureté et douceur (majoritaire) pour arriver progressivement au comble de cette douceur avec un oiseau.
[...] Loin de provoquer l'éc?urement, le scatologique confine au poétique et débouche sur l'amusement. Le burlesque est à l'?uvre. Mais, comme souvent chez Rabelais, il faut aller plus loin, ne pas s'en tenir à l'« écorce ». Certes, le jeune géant montre son inventivité et son intelligence. Mais, dans ce dialogue avec son père, certains de ses propos permettent de critiquer, allusivement, les philosophes qui ne rient pas (les « agélastes ») comme Duns Scot et les profiteurs (les gens de justice). Surtout, Rabelais fait rimer état monacal avec fécal et, en mêlant la mythologie païenne à la religion catholique, il se moque de cette dernière. [...]
[...] Gargantua, chapitre 13, Le torche-cul - François Rabelais (1534) - Comment le comique scatologique débouche-t-il sur la satire ? Introduction Gargantua découvre le monde de façon ludique : il procède à une « longue et curieuse expérience », révélant son intelligence à son père qui est prêt à lui décerner le titre de « docteur en gaie science ». Dans le chapitre précédent celui des chevaux factices, le jeune prince a déjà montré son inventivité et son astuce. Depuis le début du chapitre 13, de façon insolite, il dit utiliser des objets, des animaux, des plantes pour se torcher. [...]
[...] Dans les farces les avocats sont souvent présents6. Les hommes de lois ne sont pas admis dans l'abbaye de Thélème : « [i]ci n'entrez-pas, avides {machefains} hommes de loi {praticiens}, / Clercs, basochiens7, mangeurs du populaire » (chapitre 54). Fils d'avocat, Rabelais a fait des études de droit (canon et civil) à Poitiers, et, en connaisseur, il se livre donc volontiers à la satire du monde judiciaire. Transformer le « sac d'avocat » en torche-cul, c'est dire tout le mépris qu'il a pour cette catégorie. C. [...]
[...] Le burlesque est bien là : le plus bas communique avec le plus haut, l'ordure avec le noble. Mais la promotion du bas n'est pas seulement comique. Elle a une portée satirique. II. La satire A. Philosophique Rabelais ne se soucie pas de la vraisemblance quand il met dans la bouche de Gargantua « Maître Jehan d'Ecosse ». Un enfant de cinq ans ne peut pas avoir lu ses ?uvres, d'autant qu'il n'a pas encore reçu la bonne éducation humaniste. C'est évidemment Rabelais qui parle. [...]
[...] Selon le principe qu'il utilise contre les avocats, un élément lui suffit à rappeler une catégorie sociale pour la satiriser. Il s'agit d'une pièce de vêtement, le capuchon (« barbute »), caractéristique des moines. Allusive ici, l'association avec la défécation sera explicite au chapitre 40 (« Comment les moines sont retirés {refuis} du monde [?] ») : « [?] c'est qu'ils mangent la merde du monde, c'est-à-dire les péchés, et comme mache-merdes l'on les rejette dans leurs latrines {retraits}. » Rabelais est ici dans le sillage d'Érasme dont un des Colloques8 s'intitule « Merdatus ». [...]
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