Comme bien des poèmes du Spleen de Paris, « Le Fou et la Vénus » se rattache au spectacle de la ville, de ses jardins, de sa foule. Ici, l'accent est mis sur deux personnages allégoriques, un bouffon et une statue de Vénus, dans le rayonnement somptueux d'une journée d'été. Le poème est construit en sept paragraphes (ou strophes) répartis autour d'une articulation logique centrale soulignée par "Cependant". Cette structure permet au poète de placer le décor pour ensuite attirer l'attention sur une scène à l'intérieur, et en opposition. En soulignant la condition solitaire et désespérée du fou, Baudelaire pense sans doute à celle de l'artiste, à la recherche d'une beauté incarnée par une déesse indifférente et muette.
I. L'importance de la structure
Présentation, au présent, d'une journée et d'un lieu, le poème est construit en paragraphes successifs qui conduisent progressivement à une scène particulière. Le mouvement qu'il suit va d'une vision d'ensemble à un point précis.
A. Une vision d'ensemble : elle englobe la journée, prise dans sa totalité, puis le parc, considéré dans sa superficie entière (vaste parc). On observe l'utilisation constante du pluriel (eaux, choses, objets, parfums, couleurs) la reprise du mot "universelle", l'emploi des adjectifs ou des articles indéfinis renvoyant à des éléments nombreux ou perçus dans leur totalité. La vision d'ensemble présente les lieux, la lumière, les fleurs, les parfums. Elle conduit à la phrase de transition.
B. Une vision détaillée, centrée sur deux personnages : l'adverbe "Cependant" souligne une opposition à peu près à la moitié du poème, avec un effet de resserrement. L'articulation est soulignée également par une opposition entre des termes rapprochés : "jouissance universelle" et "être affligé". A partir de là, on observe un phénomène de recentrage de la vision, qui se fixe sur deux personnages à l'intérieur du cadre général.(...)
[...] Celles-ci sont rendues par des personnifications des métaphores et des comparaisons. Le parc s'humanise, la lumière est créatrice, révélant les parfums, qui agissent et sont perceptibles par les yeux, ou des couleurs, dotées énergie Ces confusions sensorielles, définies dans le sonnet des Correspondances permettent au poète d'accéder au mystère des choses. Ce monde semble pourtant fermé à un être lui aussi allégorique, le bouffon. B. Le bouffon, incarnation dérisoire du poète : c'est le rapprochement entre la divinité du Beau et le personnage comique qui conduit à voir dans le second, adorateur de la première, l'image du poète à la recherche du beau et conscient de son impuissance à créer. [...]
[...] Derrière le bouffon, c'est la condition de l'artiste qui est mise en cause. III. Un poème allégorique On retrouve dans le poème, derrière chacun des personnages, un des thèmes de prédilection de Baudelaire : les relations du poète avec son environnement, et avec la beauté, déjà présentée dans Les Fleurs du mal sous la forme d'une statue de marbre cruelle par son indifférence. Ainsi les trois éléments mis en jeu dans le poème, le décor, la Vénus et le fou peuvent être interprétés et déchiffrés comme des symboles. [...]
[...] Baudelaire, Le Fou et la Vénus Le Spleen de Paris, VII Quelle admirable journée! Le vaste parc se pâme sous l'œil brûlant du soleil, comme la jeunesse sous la domination de l'Amour. L'extase universelle des choses ne s'exprime par aucun bruit; les eaux elles-mêmes sont comme endormies. Bien différente des fêtes humaines, c'est ici une orgie silencieuse. On dirait qu'une lumière toujours croissante fait de plus en plus étinceler les objets; que les fleurs excitées brûlent du désir de rivaliser avec l'azur du ciel par l'énergie de leurs couleurs, et que la chaleur, rendant visibles les parfums, les fait monter vers l'astre comme des fumées. [...]
[...] En utilisant le Je, qui fait du poète un observateur, il annonce peut-être la confusion entre les deux je du texte. Celui qui parle est réellement le poète, parce qu'il faut avoir connu cette condition inférieure, pour pouvoir lire les paroles non réellement prononcées. Sensible à la beauté de ce qui l'entoure, le poète n'en est pas moins désespéré de penser que la Beauté est encore au-delà, placée si haut qu'elle en devient inaccessible. [...]
[...] Charles BaudelaireBaudelaire, Le Fou et la Vénus Comme bien des poèmes du Spleen de Paris, Le Fou et la Vénus se rattache au spectacle de la ville, de ses jardins, de sa foule. Ici, l'accent est mis sur deux personnages allégoriques, un bouffon et une statue de Vénus, dans le rayonnement somptueux d'une journée d'été. Le poème est construit en sept paragraphes (ou strophes) répartis autour d'une articulation logique centrale soulignée par Cependant. Cette structure permet au poète de placer le décor pour ensuite attirer l'attention sur une scène à l'intérieur, et en opposition. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture