Réflexion à partir de la citation de Baudelaire : « Parce que la forme est contraignante, l'idée jaillit plus intense... Avez-vous observé qu'un morceau de ciel aperçu par un soupirail ou entre deux cheminées, deux rochers ou par une arcade donnait une idée plus profonde de l'infini que le grand panorama vu du haut d'une montagne ? ». Il s'agit de réfléchir sur cette citation de Baudelaire, dans le cadre d'une pensée littéraire mais aussi artistique et philosophique.
[...] Pour finir et en nous appuyant sur les critiques artistiques de Baudelaire, nous étudierons la poésie, la littérature, voire l'art en général, comme l'alliance improbable mais nécessaire du fond et de la forme, à l'instar de l'alliance du dessin et de la couleur dans la peinture, et ce au service du Beau, quand bien même L'étude du beau est un duel où l'artiste crie de frayeur avant d'être vaincu Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris dit La Beauté de Baudelaire (Les Fleurs du Mal) dans un alexandrin parfait qui, par une symétrie évocatrice, souligne sa cruauté, sa rigueur, mais aussi son caractère immuable, d'autant plus que, ouvrant la voie aux parnassiens, la beauté est incarnée par une statue de pierre. Aussi bien dans les Fleurs du Mal que dans le Spleen de Paris, l'implacable Vénus regarde au loin je ne sais quoi avec ses yeux de marbre A la question encore ouverte qu'est-ce que la poésie ? [...]
[...] Avez-vous observé qu'un morceau de ciel aperçu par un soupirail ou entre deux cheminées, deux rochers ou par une arcade donnait une idée plus profonde de l'infini que le grand panorama vu du haut d'une montagne ? «Grand délice que celui de noyer son regard dans l'immensité du ciel et de la mer ! Solitude, silence, incomparable chasteté de l'azur [ . ] mélodie monotone de la houle, toutes ces choses pensent [ . ] mais musicalement et pittoresquement, sans arguties, sans syllogisme, sans déduction. [...]
[...] Pour terminer avec Baudelaire et sa métaphore du ciel qui a ouvert la présente réflexion, disons qu'entre la raison et la passion, le dessin et la couleur, il décerna la couronne à celui qui incarnait à ses yeux l'artiste, romantique et coloriste : Eugène Delacroix. Pour notre poète des correspondances les tableaux de Delacroix ouvrent de profondes avenues à l'imagination voyageuse avec ce petit bout de ciel ou de rocher, quelque chose de bleu à droite dans le haut de la Madeleine et le désert dont nul, à moins de la voir, ne peut imaginer ce que l'artiste a mis de poésie intime mystérieuse et romantique. [...]
[...] La création d'une de ces deux suprématies engendre la sottise, la dureté du coeur et une immensité d'orgueil et d'égoïsme. Pour Baudelaire, la poésie parnassienne ne relève que de l'agréable, selon la différence qu'établira Kant entre l'agréable et le Beau : lorsque le premier se contente d'un jugement, subjectif par définition, le second est ce qui plaît universellement et sans concept écrit-il dans la Critique de la faculté de juger, soit la signification profonde d'une oeuvre d'art, non sa forme dont le caractère agréable est du ressort du jugement. [...]
[...] Cette définition semble accorder une place importante à la forme, qui doit s'allier au sens pour enfanter l'art. C'est ainsi que les stances de Rodrigue (acte I scène 6 du Cid de Corneille) reposent sur un jeu de chiasmes qui figurent le dilemme du jeune homme, déchiré entre la loyauté qu'il doit à son père et son amour pour Chimène puisque En cet affront [son] père est l'offensé, / Et l'offenseur le père de Chimène Pour illustrer le propos de Baudelaire ici étudié, nous pouvons d'autre part prendre l'exemple du pantoum, forme poétique très exigeante : il est composé de quatrains à rimes croisées ou embrassées, et les deuxième et quatrième vers de chaque quatrains sont repris comme premier et troisième vers de la strophe suivante. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture