Les Fleurs du Mal, À une madone, poème LVII, Charles Baudelaire, recueil poétique, morale religieuse, Spleen, Idéal, amante
Recueil poétique de Charles Baudelaire (1821-1867), Les Fleurs du Mal fut publié à Paris en 1857. Il donna lieu à un procès en août 1857 pour « outrage à la morale religieuse » ainsi qu'à « la morale publique et aux bonnes mœurs ». Le poète fut condamné à 300 francs d'amende et à la suppression de six poèmes (qui seront publiés dans le Parnasse satyrique du 19ème siècle, à Bruxelles, en 1864, avant d'être repris avec d'autres pièces de circonstance dans Les Épaves). Le 6 novembre, il écrit à l'impératrice pour tenter d'atténuer le jugement, suite à quoi, son amende est réduite à 50 francs par le garde des Sceaux.
[...] Cela ne fait que confirmer ce que le titre (avec l'article une) et le sous-titre Ex-voto dans le goût espagnol annonçaient déjà. En effet, la précision hispanique rappelle le goût de Baudelaire pour l'art espagnol, et plus particulièrement pour le courant baroque qui s'y installa dès le XVIIIe siècle (pour se développer brillamment au XIXe) et utilisa exagérément le mouvement et la grandeur, avec exubérance. Il faut dire que cette conception baroque convenait particulièrement bien à celui qui mêlait étrangement la dévotion et la passion sensuelle, lui inspirant alors ce poème. [...]
[...] L'habit n'est plus du tout éclatant comme la niche qu'il nous avait présentée au vers ainsi que le confirme l'accumulation d'adjectifs dépréciateurs (Barbare, roide et lourd) et la doublure tout aussi péjorative (soupçon). Ce vers 12 en devient pesant lorsque cette doublure est mise en parallèle avec le rythme ternaire qui la précède, aussi pesant que la Madone semble faire souffrir le poète, puisque celui-ci compare ensuite cet habit à une guérite (vers 13) qui enfermera [ses] charmes. Il s'agit là d'un vocabulaire militaire, loin d'être usuel et encore moins élogieux dans un ex-voto, d'autant qu'il y mettra également Non [des] Perles brodé (vers mais toutes [ses] Larmes, l'adjectif rendant cette Madone seule responsable de la tristesse du poète ; - le corps de la Madone C'est grâce à une métaphore sexuelle (vers 15 à 18) que Baudelaire le décrit, avec un Désir qualifié de frémissant (vers 15) et d'Onduleux (vers qui monte et qui descend (vers 16) et qui Aux pointes se balance, aux vallons se repose,/Et revêt d'un baiser tout ton corps blanc et rose (vers 17-18) ; - Je te ferai de mon Respect de beaux Souliers (vers 19) En déposant son Respect à ses pieds (vers le poète se situe à nouveau bien dans la notion du culte de latrie, d'autant que l'adjectif divins accordé à cette partie de l'anatomie (vers 20) déifie sa maîtresse. [...]
[...] Le poète, personnifiant ses Pensers (vers les voue même à une adoration perpétuelle manifestée par des yeux de feu (vers c'est-à-dire enflammés par la passion. Baudelaire va ensuite poursuivre l'idée du culte à rendre devant l'autel en manifestant sa préférence pour l'odorat. Il cite ainsi différentes résines aromatiques à y faire brûler : Benjoin, Encens, Oliban, Myrrhe (vers dont l'accumulation simule bien l'idée de rite sérieux. Et les Vapeurs (vers 36) ainsi produites, sublimant l'Esprit orageux (vers 36) du poète, monteront vers la maîtresse devenue un sommet blanc et neigeux (vers 35). [...]
[...] Or, jusqu'à présent, point d'élévation spirituelle, mais au contraire un contexte extrêmement sombre et dévalorisé qu'évoque un locuteur tout à fait sérieux et en proie au spleen : Loin du désir mondain et du regard moqueur (vers 4). Toute cette première partie n'est qu'une soumission progressive au pied de sa maîtresse, qui ne va cependant pas sans une vengeance symptomatique de l'orgueil romantique. Elle est d'ailleurs mise en place par une rupture dans le poème, un blanc typographique qui va être fatal à la Madone. [...]
[...] Cette œuvre majeure fut lentement mûrie par Baudelaire qui, dès 1840, parle de ses Fleurs singulières Il avait fait plusieurs fois annoncer dans des revues la parution de son recueil sous les titres suivants : les Lesbiennes puis les Limbes. Mais sur le conseil d'un ami, il y renonce. Le titre définitif, trouvaille qui est attribuée au critique littéraire Hippolyte Babou (1824-1878), repose sur l'oxymore que Charles Baudelaire a tenu à entretenir durant toute sa vie littéraire. En effet, il considère la nature comme laide, par définition, et la beauté comme artificielle. [...]
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