Les Fleurs du Mal, La Géante (XIX), Charles Baudelaire, poèmes, recueil poétique, gigantisme, Spleen, Idéal
Le groupe de trois poèmes que nous avons évoqué permet à Baudelaire d'illustrer pleinement son goût du paradoxe et d'exprimer ses curieuses opinions esthétiques. Dans La Beauté (XVII), il affirme la fatalité du destin de celui qui la cherche, tandis que dans le poème précédent, L'Idéal (XVIII), il esquisse son idéal féminin en établissant un parallèle avec l'art classique et la féminité « rouge » qui s'en dégage, avec toute l'ambiguïté que cela sous-entend. Dans celui-ci, s'appuyant sur une syntaxe suggestive, il va teinter de gigantisme la nature et la rendre à la fois fascinante et repoussante.
[...] Baudelaire, Les Fleurs du Mal, La Géante (XIX). ÉTUDE ANALYTIQUE Introduction Recueil poétique de Charles Baudelaire (1821-1867), Les Fleurs du Mal fut publié à Paris en 1857. Il donna lieu à un procès en août 1857 pour outrage à la morale religieuse ainsi qu'à la morale publique et aux bonnes mœurs Le poète fut condamné à 300 francs d'amende et à la suppression de six poèmes (qui seront publiés dans le Parnasse satyrique du 19ème siècle, à Bruxelles, en 1864, avant d'être repris avec d'autres pièces de circonstance dans Les Épaves). [...]
[...] L'humanisation de la nature Dès le premier vers, tout doute est levé : la majuscule (la Nature) personnifie la nature, d'autant que Baudelaire évoque en suivant un temps lointain (Du temps que) où celle-ci disposait d'une verve puissante, c'est-à-dire d'une grande énergie. L'emploi du mot verve renvoie à la Nature originelle. En effet, venant du latin verbum il marque une allusion à la Genèse Au commencement était le Verbe, et le Verbe était tourné vers Dieu, et le Verbe était Dieu De plus, la précision chaque jour (vers rappelle les sept jours de la Genèse qui furent nécessaires à Dieu pour mener à bien sa création. [...]
[...] Le titre définitif, trouvaille qui est attribuée au critique littéraire Hippolyte Babou (1824- 1878), repose sur l'oxymore que Charles Baudelaire a tenu à entretenir durant toute sa vie littéraire. En effet, il considère par définition la nature comme laide et la beauté comme artificielle. La première des six sections, intitulée Spleen et Idéal, est de loin la plus fournie, ne comptant pas moins de quatre-vingt-cinq poèmes. Elle constitue une forme d'exposition : c'est le constat du monde réel tel que le perçoit le poète. Les textes, de manière interne ou dans les rapports instaurés avec les poèmes voisins, reflètent la dualité posée dans le titre. [...]
[...] Mais, si elle semble fascinante, cette description n'en est pas moins repoussante, grâce à quelques notes discordantes judicieusement disposées tout au long du poème : monstrueux (vers terribles (vers sombre (vers et malsains (vers 11). Une syntaxe suggestive Affectant l'intervenante du poème, le gigantisme s'étend également à la syntaxe. En effet, au point de vue sémantique, le poème n'est formé que de deux phrases qui suivent la même gradation : - vers 1 à 4 : première phrase commençant par deux vers amples qui ne sont qu'une proposition circonstancielle. [...]
[...] On sent alors s'exprimer l'attrait sensuel suscité avant tout par la plastique de la femme aimée, raison qui retenait Baudelaire auprès de sa maîtresse. De même que dans le quatrain précédent, la dernière vision du vers 11 s'ouvre par la mention d'un climat dont la lourdeur et le caractère inquiétant (soleils malsains) sont renforcés par le pluriel. Par un enjambement pertinent de strophe à strophe, la phrase continue et la vision du poète se déploie. C'est d'abord celle de la géante qui affirme sa puissance, à l'image de l'influence de la femme aimée sur le poète : son extension est immense (s'étendre à travers la campagne, vers 12) et se fait sur tout le paysage qui évoque alors un lieu où l'amant pourrait s'unir à sa maîtresse, ainsi que la vision érotique de l'ombre de ses seins (vers 13) pourrait le laisser entendre. [...]
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