Les Fleurs du Mal, Brumes et pluies, Baudelaire, sonnet, poésie, poésie pétrarquiste, contraste, obscurité, mort, registre galant, art poétique
Le genre du sonnet, qui se développe en France durant la Renaissance, est généralement réservé à la poésie galante. On peut notamment penser au Chansonnier de Pétrarque, aux Odes à Hellène de Ronsard, ou encore à l'Olive de Joachim du Bellay. Toutefois, avec le sonnet « Brumes et pluies », c'est à une ode inattendue que se livre Baudelaire : celle d'un temps maussade associé à la mort. Ce traitement poétique d'objets prosaïques est emblématique du recueil dont ce poème est issu, les Fleurs du mal.
[...] Si Baudelaire utilise le vocabulaire de l'ode amoureuse (« mon cœur », vers 3 ; « mon âme », vers ce n'est que pour mieux le subvertir, en l'associant à des images morbides : le « linceul », le « tombeau » et le « corbeau » incarnent métonymiquement la mort. Ce jeu de contrastes est poursuivi dans les deux quatrains par des jeux d'antithèses. Ainsi, les deux hémistiches du vers 11 entrent en contradiction : la connotation péjorative de l'adjectif « blafardes » se heurte au mot « reines ». Au vers suivant, l'oxymore « pâles ténèbres » crée un contraste encore plus frappant. Finalement, la célébration amoureuse est reléguée aux deux derniers vers avec l'expression « deux à deux ». [...]
[...] Baudelaire défend d'ailleurs cet amour de la contrainte poétique lorsqu'il affirme que « parce que la forme est contraignante, l'idée en jaillit plus intense ». On retrouve en outre certains éléments traditionnels de la poésie pétrarquiste. Par exemple, l'isotopie du froid et de la chaleur, particulièrement notable dans le « Sonnet des antithèses », sature le texte : « hivers » (v. « l'autan froid » (v. « tiède renouveau » (v. « nos climats » (v. 11). De même, le registre encomiastique fait penser à l'emphase traditionnelle des sonnets d'amour. [...]
[...] Les Fleurs du Mal, Brumes et pluies - Charles Beaudelaire (1857) - Comment Baudelaire exploite-t-il et subvertit-il ici le genre du sonnet ? Le genre du sonnet, qui se développe en France durant la Renaissance, est généralement réservé à la poésie galante. On peut notamment penser au Chansonnier de Pétrarque, aux Odes à Hellène de Ronsard, ou encore à l'Olive de Joachim du Bellay. Toutefois, avec le sonnet « Brumes et pluies », c'est à une ode inattendue que se livre Baudelaire : celle d'un temps maussade associé à la mort. [...]
[...] En outre, dans le deuxième quatrain, la « girouette » et le « corbeau » pourraient constituer des incarnations du poète. Ces figures de volatile font penser à la métaphore de l'albatros développée par Baudelaire dans le poème éponyme. En se décrivant comme un « corbeau » en train d'ouvrir ses ailes, Baudelaire fait écho au corbeau de la fable, et revendique ironiquement un ramage peu mélodieux. Il donne ainsi ses lettres de noblesse à un art dissonant et nouveau. [...]
[...] Conclusion Pour conclure, « Brumes et pluies » suit la forme du sonnet traditionnel, pour mieux le renouveler en profondeur. En effet, Baudelaire se livre à l'éloge paradoxal de la boue et des ténèbres, en mêlant le registre galant à une évocation de la mort et de l'obscurité. Le sonnet se dote ainsi d'une dimension méta-discursive, qui permet à Baudelaire de dresser une sorte d'art poétique. Le genre du sonnet est particulièrement propice à ce genre de jeu. Ainsi, Tristan Corbière, dans ses Amours jaunes, réalise un sonnet inversé où le poète prend la voix non plus d'un corbeau, mais d'un crapaud. [...]
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