Madame Bovary est sûrement l'un des plus célèbres roman de Gustave Flaubert, tant par l'universalité des thèmes qu'il aborde que par le scandale qui a suivi sa publication en 1857. Avec pour cadre d'action la Normandie, Flaubert se concentre sur les "moeurs de province" en décrivant le quotidien monotone d'une femme, Emma, que ses rêves et ses illusions finiront par tuer. Cet extrait se situe au chapitre III de la première partie. Charles Bovary, officier de santé à Tostes vient de perdre sa femme. Après un deuil conventionnel, il jouit d'une indépendance nouvelle. Ses visites fréquentes à la ferme des Bertaux lui permettent de faire la rencontre d'Emma, dont il tombe amoureux. Ce texte a la particularité de suivre la perception de Charles : on accompagne donc son regard tout au long de l'extrait. L'originalité de Flaubert est aussi de casser le topos littéraire de la première rencontre en montrant les signes de discordance entre les deux personnages.
I) L'arrivée de Charles et la découverte d'Emma
L'arrivée de Charles se fait par étapes, lentement, comme le suggère le rythme saccadé de la première phrase. La rencontre débute par une négation puisque Charles « n'aperçut point d'abord Emma ». L'ambiance de la pièce est feutrée : Flaubert insiste sur l'opposition entre la pénombre et la lumière en décrivant les rayons de soleil qui pénètrent tant bien que mal dans la pièce dont les auvents sont pourtant fermés. Tel un peintre, le romancier met en place son tableau, tableau que Charles observe avec minutie dans l'espoir de trouver Emma. On constate que son regard se pose sur différents objets tels que « les pavées », les « meubles », les « mouches », ou encore les « verres » avant d'enfin apercevoir Emma, « entre la fenêtre et le foyer ». Flaubert place son personnage dans le tableau à un endroit de clair-obscur, peut-être pour mettre en relief sa complexité : comme le révèlera le roman, Emma est sans cesse ballotée entre des moments de joie et des moments de doute existentiel caractérisés par un ennui profond. (...)
[...] Des mouches, sur la table, montaient le long des verres qui avaient servi, et bourdonnaient en se noyant au fond, dans le cidre resté. Le jour qui descendait par la cheminée, veloutant la suie de la plaque, bleuissait un peu les cendres froides. Entre la fenêtre et le foyer, Emma cousait ; elle n'avait point de fichu, on voyait sur ses épaules nues de petites gouttes de sueur. Selon la mode de la campagne, elle lui proposa de boire quelque chose. Il refusa, elle insista, et enfin lui offrit, en riant, de prendre un verre de liqueur avec elle. [...]
[...] L'air, passant par le dessous de la porte, poussait un peu de poussière sur les dalles ; il la regardait se traîner, et il entendait seulement le battement intérieur de sa tête, avec le cri d'une poule, au loin, qui pondait dans les cours. Emma, de temps à autre, se rafraîchissait les joues en y appliquant la paume de ses mains ; qu'elle refroidissait après cela sur la pomme de fer des grands chenets. Introduction Madame Bovary est sûrement l'un des plus célèbres roman de Gustave Flaubert, tant par l'universalité des thèmes qu'il aborde que par le scandale qui a suivi sa publication en 1857. [...]
[...] Dans tout ce second paragraphe, c'est Emma qui est sujet des phrases, c'est elle qui est à l'initiative des actions, comme si Charles était paralysé devant la jeune fille, ou tout simplement incapable de prendre des décisions. La description très précise des gestes d'Emma traduit l'attention que lui porte Charles. La phrase descriptive s'achève sur le mot bouche : c'est là que s'arrête un instant le regard de Charles. D'ailleurs dans la suite du paragraphe, ses yeux restent centrés sur son visage, sa bouche, sa langue, ses dents . [...]
[...] Le lecteur peut rire de la singularité de cette rencontre, mais il peut aussi être déçu de la mollesse de Charles. III. Une rencontre prémonitoire Après ce cours interlude de joie et de rires, Emma se rassit comme pour marquer le retour à la monotonie, au recommencement suggéré par les préfixes re rassit reprit reprises Le silence devient à nouveau pesant et Emma ne regarde plus Charles le front baissé Lui aussi semble être (déjà) désintéressé : au lieu de continuer à regarder la jeune fille, il regarde le dessous de la porte la poussière . [...]
[...] Charles semble dorénavant complètement coupé d'Emma : il entendait seulement le battement intérieur de sa tête La proximité établie entre Charles et la poule permet au narrateur de rabaisser Charles à un vulgaire animal de basse cour. Emma, de son côté, apparaît lointaine et distante. Concentrée sur son ouvrage, elle semble inabordable. La locution de temps à autre traduit l'idée que le temps passe, et finit même par se faire long. Alors que Charles est enfermé dans son monde, à écouter son propre cœur battre (d'amour?), Emma est active. [...]
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