Fin de Partie est une pièce exemplaire de ce qu'Adorno appelait "la crise du drame" et définissait ainsi : "le théâtre ne peut pas prendre uniquement l'absence de sens, [...] les composants du théâtre apparaissent ici après leur propre mort théâtre". Subséquemment, il est intéressant de se pencher sur le traitement fait par Beckett de la notion de personnage. Qui sont-ils ? Que sont-ils ? Nous verrons dans un premier temps que Beckett "met en crise" le concept même du personnage et qu'ainsi, il donne comme nécessaire leur fonctionnement par couple. Enfin, dans un dernier temps, nous verrons les personnages de fin de partie envisagés comme des personnages dégradés, en recherche, des allégories de la condition humaine (...)
[...] Lorsque l'on se penche sur le nom de Hamm par exemple. On peut le rapprocher à la fois d'Hamlet, dont il serait alors l'avatar dégradé dont l'impuissance se serait aggravé ou bien du personnage d'Amfortas de Wagner en raison de la sonorité mais également du fait de l'analogie de leurs deux situations : Amfortas est un roi blessé, souffrant, qui ne peut ni vivre ni mourir et qui demeure immobilisé au milieu de la scène. Ainsi, ces deux rapprochements, Beckett nous inviterait à voir dans Hamm une représentation qui fait sens, notamment du côté de la malédiction par le créateur. [...]
[...] La folie que demeure, pour tous, la fin de partie. A la recherche d'une humanité : la tension métaphysique Enfin, Beckett retrouve ici l'une des fonctions fondamentales du théâtre, un art visuel ; depuis la tragédie grecque, le héros théâtral est celui que l'on regarde publiquement. Les personnages parlent parce qu'ils ont l'impression d'être observés. On en serait pas en train de signifier quelque chose ? s'inquiète Hamm. Quand il se pose cette question, il imagine quelqu'un en train de le regarder. [...]
[...] Là aussi, les personnages ne semblent pouvoir exister l'un sans l'autre. Cela est dû à la forte analogie qui l'on peut dès le départ tracer entre les personnages : ils sont les mêmes apparences, le même âge, ils sont tout deux dans les poubelles, leurs patronymes sont étonnamment proches . Leur dépendance est créée par le texte qui les associe totalement, notamment par la symétrie de leurs répliques. Cette union réside aussi la tendresse qu'ils ont l'un pour l'autre : Nell appelle affectueusement Nagg mon gros Même si l'expression peut prêter à sourire, elle s'en semble pas moins gage d'une sincérité. [...]
[...] Ainsi, Beckett rend indispensable la structure du couple à travers notamment H&C et N&N. Enfin, les personnages de fin de partie sont des personnages dégradés, entre la vie et la mort qui semblent en fait en recherche, en recherche d'une humanité à travers nos yeux de lecteurs. Beckett semble mêler le lecteur et le personnage dans une quête profonde. Il brise le personnage de théâtre mais fait naître une nouvelle forme d'interrogation sur la machine même du théâtre, de l'homme, par l'autre et son regard. [...]
[...] C'est un rapport de domination liée à un lien de dépendance. En premier lieu il convient de se pencher sur le couple qui semble la clé de voute de l'univers de fin de partie : Hamm et Clov qui illustrent parfaitement ce rapport complexe. Les deux personnages ne peuvent se passer l'un de l'autre, Hamm entend cependant dominer Clov : C'est moi qui t'ai servi de père dit Hamm à Clov qui avoue ne pas se souvenir de son vrai père (p. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture